vendredi 29 novembre 2013

Novembre 2013

Les sorties, c'est plus ou moins fini pour 2013. On n'a maintenant presque plus que les ressorties et les compiles traditionnelles de Noël, et cela sera encore pire en décembre, qui sera quasi vierge de nouveautés. Ceci dit, quelques albums originaux vaguement importants sont quand même sortis en novembre, et on va en parler.

DétroitMon album du mois, c'est Détroit - Horizons. Aucune envie de polémiquer, d'excuser, d'expliquer, je n'en ai pas envie et je ne m'en sens pas capable. Ce que je peux dire, par contre, c'est qu'Horizons est un album d'une infinie tristesse, d'une terrible désolation. Mis à part quelques rares saillies électriques pouvant rappeler Noir Désir, l'ambiance créée par Bertrand Cantat et Pascal Humblet est étouffante, intense et implacable de beauté triste. On pourra interpréter les paroles comme on voudra, mais pour moi, certains passages me semblent sans équivoque quant à leurs références : si Cantat ne pouvait pas parler de l'"affaire" (voire des affaires), les censeurs n'ont pas vraiment écouté l'album (mais je n'ai rien compris à ces histoires de chiens ninja).

Quoi d'autre en novembre? Tant que je parle d'un truc en français, j'ajoute le nouveau Guerilla Poubelle, qui a eu la lourde tâche de succéder à Punk=Existentialisme. Amor Fati n'est pas aussi puissant, mais comme les miracles se produisent rarement deux fois, on s'en contentera amplement. La nouvelle sensation alt-pop Lorde, néo-zélandaise alignant bien malgré elle les reviews truffés de clichés vaguement sexistes ("fraîche", "pas vulgaire", etc etc). J'espère pour elle qu'elle ne deviendra pas la nouvelle Lana Del Rey, ce qui serait vraiment dommage (Pure Heroine). Connan Mockasin, le chouchou des amateurs d'alt-pop (encore) luxuriante mais chantée par un homme, ce qui est *évidemment* nettement moins vulgaire, forcément. Bien, mais je trouve quand même que ça manque de substance. Mais pas autant que Jake Bugg, qui bat le fer tant qu'il est chaud en sortant déjà son second album, Shangri-La. Mais vu que le fer en question rappelle une période de la musique british heureusement oubliée, on l'oubliera aussi, le Jake. Le fait que je ne supporte pas sa voix n'aide pas, je le reconnais. Ah, et pour finir le c-c-c-combo breaker, il est produit par Rick Rubin. On retiendra aussi Swearin' et Surfin Strange, superbe album du groupe de l'autre soeur Crutchfield, riyl : Waxahatchee. On reparlera des deux dans quelques semaines.

Vous vous rappelez de Lady Gaga? Il semble que son quart d'heure est déjà fini, Icare, le soleil, tout ça. D'autant plus dommage qu'Artpop est peut-être son meilleur album. Evidemment, il souffre de quelques fillers atroces, mais au moins la moitié de l'album est acceptable, ce qui est bien plus que le précédent (celui avec la pochette Judas Priest). Elle devrait se la jouer encore plus Bowie et fonder son Tin Machine, maintenant.

Et à part ça, compiles et ressorties, donc. The Next Day de Bowie avec des morceaux en plus et un remix de James Murphy, une compile extensive des excellents et très influents The Beta Band, un best of des nettement moins influents A Perfect Circle, une seconde compilation des passages des Beatles à la BBC (toujours aussi anecdotique, mais charmant) et c'est plus ou moins tout pour ce mois-ci. Ah oui, j'oubliais, un grand boxset très cher de Therapy? (The Gemil Box), avec leurs quatre premiers albums remasterisés, un livre, un dvd, une cassette et quatre disques remplis d'inédits. Je suis fauché, pensez à moi, merci.

J'ajoute quelques morceaux d'EP ou d'albums à venir dans la toute petite playlist Spotify, et la prochaine fois, je reviens avec mon top 100 des albums de l'année. Gros travail en perspective, parce que j'en ai quand même presque 200 sur ma liste même pas virtuelle. Who says rock is dead, etc etc.

jeudi 7 novembre 2013

Octobre 2013

2013 est maintenant presque terminé, en terme de sorties de nouveaux albums. Il ne reste plus que les éditions spéciales et compiles de Noël (Bowie, Beatles et quatre millions d'autres) et des artistes en perte de vitesse qui sortent après les autres histoire de minimiser la concurrence (Lady Gaga). Mais c'est peut-être en octobre qu'est sorti l'album de l'année, ou en tout cas celui dont parle le plus (avec Yeezus, allez). Et c'est sans problème mon album du mois.

ReflektorParce qu'il était très attendu, Reflektor, et annoncé par une campagne marketing roots et efficace. Arcade Fire est le plus gros groupe indé du monde, même s'il n'est pas stupide de dire qu'ils n'arriveront peut-être jamais à dépasser l'impact émotionnel de leur début, Funeral. Alors qu'il aurait été plus simple de se répéter, les montréalais ont engagé le leader de leur groupe préféré, James Murphy, pour produire un album radicalement différent. Reflektor est long (85 minutes, des morceaux dépassant allègrement les six), ambitieux (double album en deux parties thématiques) et terriblement varié, alliant du rock indé relativement classique à des influences haïtiennes (second pays du groupe) en passant par des références littéraires (Orphée et Eurydice) illustrant les thèmes chéris par le groupe comme la perte de l'innocence, l'enfance, l'évolution vers l'âge adulte, la mort. Il faudra sans doute des mois pour décrypter Reflektor, mais est-ce bien nécessaire?

Octobre a aussi vu la sortie du dixième album de Pearl Jam, qui succède au lamentable Backspacer. L'avantage de succéder à un album oubliable, c'est qu'il n'est pas bien difficile de faire mieux. Lightning Bolt est meilleur que Backspacer, mais il est peut-être aussi le meilleur album du groupe en dix ans. Malheureusement, il reste très frustrant : à côté de morceaux intéressants comme Infallible, Pendulum, le vitriolique My Father's Son ou le déjà classique Sirens, Pearl Jam (ou le producteur Brendan O'Brien, qui devrait subir le même sort que Jaime Lannister un de ces jours) a jugé bon d'inclure Sleeping By Myself, déjà anecdotique sur l'album solo d'Eddie Vedder (lui-même anecdotique, pour être honnête) et présent ici en version navrante ou Future Days, qui a au moins l'avantage en tant que dernier morceau de l'album d'être facilement oublié. Frustrant, donc, surtout que les fans connaissent l'existence d'excellents morceaux (Of the Earth, Cold Confession notamment) qui semblent avoir été oubliés par le groupe. Occasion à moitié loupée, donc.

On a eu très peur pour Lemmy, qui a connu pas mal de problèmes de santé cette année, mettant à mal l'évidence de son immortalité. 2012 était la première année paire depuis 1994 à ne pas voir d'album de Motörhead, mais la patience est récompensée : Aftershock est un très bon album (bien que le niveau du trio est ahurissant depuis des années), plus varié que ce que l'on pense (à tort!) du groupe. Si Aftershock venait (mais ce ne sera pas le cas) à être le dernier album de Lemmy, on a connu bien pire épitaphe.

Pour le reste, octobre est un melting pot de sorties diverses et variées. Après moultes tentatives (toutes foirées) d'accrocher un semblant de renouveau, Korn joue son avant-dernière carte et fait revenir le guitariste Head, parti rejoindre Jésus voici une dizaine d'années. Pour être tout à fait correct, Korn a déjà fait pire que The Paradigm Shift, mais il ne leur reste plus qu'une seule solution pour accrocher l'attention : se séparer et revenir cinq ans plus tard. Ce que n'a jamais eu besoin de faire un certain Paul McCartney, probable meilleur compositeur de l'histoire de la composition. New a été confié à quelques producteurs "modernes" (Ronson, Johns, Epworth et Giles Martin) qui réussissent à garder son inimitable son, le mettre à jour sans le ridiculiser. Une vraie bonne surprise.

Deux groupes cultes, plus ou moins gallois, et avec une attention particulière aux paroles pour suivre : Los Campesinos! et Future of the Left. On pourrait tellement comparer Los Campesinos! aux Smiths pour plein de raisons,  comme les paroles (évidemment) et leur audience fantastiquement fanatique. Mais ce serait complètement passer à côté de l'attrait de la musique du groupe, délicieusement mélancolique, recherchée, douloureuse, rassurante, glorieuse (No Blues). Quant à Future of the Left, maintenant qu'ils ont un album de plus que Mclusky, il faudrait peut-être arrêter d'en parler à chaque fois. Oops. Financé par Pledge Music, How to Stop Your Brain in an Accident est ce qu'on peut attendre de la bande à Andy Falkous, maintenant fermement un quatuor. Abrasif tant au niveau de la musique que des paroles, l'album se permet toutefois quelques excursions réussies vers une certaine idée de la musique pop (Falco chante!). Un EP 6 titres d'outtakes intéressantes, Human Death, sort en parallèle.

Sleigh Bells tente une seconde fois de nous faire croire que leur date d'expiration n'est pas dépassée depuis longtemps, mais on n'est pas dupe. Derek Miller lève un peu la main sur la production, légèrement moins bourrine qu'avant et nous dit qu'Alexis Krauss a beaucoup participé à l'écriture. Mais si l'on considère que l'album (Bitter Rivals) est constitué de morceaux de 3 minutes maximum qui deviennent emmerdants après 40 secondes, ce n'est pas suffisant, malgré les tentatives de sonner comme Beyoncé.

Plus intéressant, The Dismemberment Plan nous revient pour de bon, avec leur premier album en douze ans. Beaucoup de choses se sont produites depuis, notamment 4 tonnes de groupes influencés par Travis Morrison & co. Uncanney Valley arrive sans faire trop de bruit, et repart de la même manière. Agréable et divertissant, en espérant que c'était leur but. Cage the Elephant est annoncé comme "the next big thing" depuis quelques années, et il est possible que Melophobia soit l'album qui les fasse exploser (tout comme une tournée prochaine avec Muse). Mais je n'y connais rien à ces trucs, je trouve juste que leur son est sympa sans plus : à force d'emprunter un peu partout, on se retrouve avec peu d'identité. Poliça s'est bien détaché de l'étiquette Bon Iver (Justin Vernon vient dire bonjour sur un morceau, quand même) et sort un album d'indé-électro (Shulamith) bien réalisé mais peut-être un peu fatigant. Mais une fois de plus, qu'est-ce que j'en sais, j'ai bien aimé le dernier album d'Electric Six, Mustang, qui ressemble à un album d'Electric Six. Et j'ai bien aimé aussi Corsicana Lemonade, le nouvel album tout à fait recommandable de White Denim, qui tape un peu dans tous les sens, comme une sorte de version mathy de Soundgarden qui jouerait du classic rock.

Dans la catégorie EP, on notera avant tout Best Coast, qui revient brillamment à la fuzzpop du premier album avec la voix de Bethany qui a bien progressé depuis (Fade Away) mais aussi Albert Hammond Jr., dont AHJ ressemble plus au son Strokes que tout ce qu'ils ont sorti en dix ans. Toujours en EP, les comiques de Fall Out Boy se la jouent Black Flag sous la direction de Ryan Adams (Pax-Am Days), alors que le duo TheHELL (Atom Willard et Matt Skiba) fait nettement mieux avec le brut Southern Medicine. Parquet Courts confirment qu'ils sont bien la réincarnation de Pavement joué par les Beastie Boys (Tally All The Things You Broke), The Men continuent leur évolution de plus en plus loin du hardcore quasi instrumental de leurs débuts avec un EP qui porte très bien son titre (Campfire Songs) alors que Stone Temple Pilots récupèrent un chanteur fiable (Chester Bennington) mais n'arriveront jamais à sortir de la division 3 du rock indé dans laquelle ils végètent depuis toujours (High Rise).

Voilà pour octobre, il est probable que novembre et décembre soient balancés en même temps, juste avant le récapitulatif de 2013.

Playlist Spotify ci-dessous!