dimanche 25 avril 2010

Melissa Auf der Maur - Out of Our Minds

Certaines coïncidences sont parfois si étonnantes qu'on ne saurait les inventer. Melissa Auf der Maur, on la connaît surtout comme ex-bassiste de Hole, et brièvement des Smashing Pumpkins. Son premier album était sorti en même temps que celui de Courtney Love (chanteuse de Hole, quand même) et six ans après, devinez quoi? Rebelote, en encore plus étrange. Courtney Love a décidé de reprendre le nom de son ancien groupe (Hole, donc) pour sortir son nouvel album, Nobody's Daughter, prévu de longue date. Mais elle s'est entourée de nouveaux musiciens, ne reprenant aucun autre membre de "Hole" qu'elle-même. Quant à Melissa, surprise par la décision de Love, elle était aux prises depuis 2004 avec quelques problèmes légaux, venant du fait qu'elle a décidé de s'occuper intégralement de son second album, qu'elle voulait ambitieux.

Pour la seconde fois, Love et Auf der Maur sortent un album en même temps, et pour la seconde fois, la rousse bassiste sort très (mais alors, très) facilement gagnante de la confrontation. On reparlera prochainement du gâchis de CO² qu'est Nobody's Daughter, car maintenant, on va s'intéresser à Out of Our Minds, ou OOOM en plus court. Ambitieux, il l'est effectivement : OOOM est un album, mais aussi un comic book et un moyen métrage réalisé par Tony Scott. Melissa a créé une histoire fort complexe, mêlant rites païens, ésotérisme et mythologie viking, tout en tentant de rester accessible : même si l'expérience est censée être multimédia, l'album peut s'écouter individuellement du reste. On se référera au site officiel pour plus de détails.

OOOM commence par un instrumental qui remplit exactement son rôle : la tension monte au fur et à mesure que la basse d'Auf der Maur prend de l'ampleur, et s'arrête juste au moment où le riff très altrock 90s du morceau-titre commence. Même si six ans se sont écoulés, on reste en terrain connu mais, on remarquera toutefois une plus grande attention au détail, aux différentes ambiances. Out of Our Minds donne le ton de l'histoire : il faut voyager hors de l'esprit et dans nos coeurs. On va essayer. Isis Speaks introduit une caractéristique de l'album : fidèle à sa volonté de raconter une histoire, Melissa parle avec la voix de plusieurs personnages, et modifie donc parfois la sienne. Un peu déroutant, mais on s'y fait, surtout avec un morceau si bien écrit. Elle utilisera le procédé à plusieurs reprises tout au long de l'album, notamment sur l'excellent Follow The Map, même si six ans ne parviennent pas à faire oublier que le riff est assez similaire à celui de Beast of Honor, extrait du premier album.


OOOM est aussi assez varié, même si on reste dans un univers facilement reconnaissable. Là où le premier album portait fortement la marque des invités/compositeurs (notamment Josh Homme), celui-ci est plus intime, plus personnel, peut-être aussi moins passe-partout. Auf der Maur place un second instrumental en quatrième piste et un troisième (fort étrange) un peu plus loin, n'hésite pas à varier les tempi à l'intérieur même de certains morceaux (22 Below, de ballade soft à truc lourd à la Sabbath) ni à écrire des refrains limite trop catchy (Meet Me on the Darkside). Le moment le plus étrange de l'album est un duo avec Glenn Danzig : les deux voix se marient très bien, mais malheureusement, le morceau un peu faible n'atteint jamais la transcendence de son équivalent du premier album, l'exquis Taste You avec Mark Lanegan. Après cette petite période de flottement, l'album se finit très bien, avec l'excellent The Key, qui bénéficie du talent du meilleur batteur à louer du rock contemporain (Josh Freese) et le morceau bonus Mother's Red Box, sans doute trop agressif/QOTSA pour être inclus sur l'album lui-même.


L'impression est mitigée, mais positive. Par rapport au premier album, les morceaux sont sans doute moins immédiats, moins mémorables. Mais il faut tenir en compte qu'il s'agissait plus d'une collection de morceaux souvent co-écrits qu'un album solo cohérent, ce qu'est largement Out of Our Minds. La production est aussi différente, passant de l'altergrunge dépassé à une prod plus léchée, plus précise et nettement plus fouillée. De plus, Out of Our Minds mériterait certainement d'être écouté en contexte avec les autres composantes du projet, ce qui n'a pas été le cas ici. On pourrait donc dire qu'il représente le vrai premier album de Melissa Auf der Maur, et pour cela, on espère qu'il ne faudra plus six ans pour entendre la suite. De toute façon, Courtney Love n'a jamais eu le niveau.


Melissa Auf der Maur - Out of Our Minds

Certaines coïncidences sont parfois si étonnantes qu'on ne saurait les inventer. Melissa Auf der Maur, on la connaît surtout comme ex-bassiste de Hole, et brièvement des Smashing Pumpkins. Son premier album était sorti en même temps que celui de Courtney Love (chanteuse de Hole, quand même) et six ans après, devinez quoi? Rebelote, en encore plus étrange. Courtney Love a décidé de reprendre le nom de son ancien groupe (Hole, donc) pour sortir son nouvel album, Nobody's Daughter, prévu de longue date. Mais elle s'est entourée de nouveaux musiciens, ne reprenant aucun autre membre de "Hole" qu'elle-même. Quant à Melissa, surprise par la décision de Love, elle était aux prises depuis 2004 avec quelques problèmes légaux, venant du fait qu'elle a décidé de s'occuper intégralement de son second album, qu'elle voulait ambitieux.

Pour la seconde fois, Love et Auf der Maur sortent un album en même temps, et pour la seconde fois, la rousse bassiste sort très (mais alors, très) facilement gagnante de la confrontation. On reparlera prochainement du gâchis de CO² qu'est Nobody's Daughter, car maintenant, on va s'intéresser à Out of Our Minds, ou OOOM en plus court. Ambitieux, il l'est effectivement : OOOM est un album, mais aussi un comic book et un moyen métrage réalisé par Tony Scott. Melissa a créé une histoire fort complexe, mêlant rites païens, ésotérisme et mythologie viking, tout en tentant de rester accessible : même si l'expérience est censée être multimédia, l'album peut s'écouter individuellement du reste. On se référera au site officiel pour plus de détails.

OOOM commence par un instrumental qui remplit exactement son rôle : la tension monte au fur et à mesure que la basse d'Auf der Maur prend de l'ampleur, et s'arrête juste au moment où le riff très altrock 90s du morceau-titre commence. Même si six ans se sont écoulés, on reste en terrain connu mais, on remarquera toutefois une plus grande attention au détail, aux différentes ambiances. Out of Our Minds donne le ton de l'histoire : il faut voyager hors de l'esprit et dans nos coeurs. On va essayer. Isis Speaks introduit une caractéristique de l'album : fidèle à sa volonté de raconter une histoire, Melissa parle avec la voix de plusieurs personnages, et modifie donc parfois la sienne. Un peu déroutant, mais on s'y fait, surtout avec un morceau si bien écrit. Elle utilisera le procédé à plusieurs reprises tout au long de l'album, notamment sur l'excellent Follow The Map, même si six ans ne parviennent pas à faire oublier que le riff est assez similaire à celui de Beast of Honor, extrait du premier album.


OOOM est aussi assez varié, même si on reste dans un univers facilement reconnaissable. Là où le premier album portait fortement la marque des invités/compositeurs (notamment Josh Homme), celui-ci est plus intime, plus personnel, peut-être aussi moins passe-partout. Auf der Maur place un second instrumental en quatrième piste et un troisième (fort étrange) un peu plus loin, n'hésite pas à varier les tempi à l'intérieur même de certains morceaux (22 Below, de ballade soft à truc lourd à la Sabbath) ni à écrire des refrains limite trop catchy (Meet Me on the Darkside). Le moment le plus étrange de l'album est un duo avec Glenn Danzig : les deux voix se marient très bien, mais malheureusement, le morceau un peu faible n'atteint jamais la transcendence de son équivalent du premier album, l'exquis Taste You avec Mark Lanegan. Après cette petite période de flottement, l'album se finit très bien, avec l'excellent The Key, qui bénéficie du talent du meilleur batteur à louer du rock contemporain (Josh Freese) et le morceau bonus Mother's Red Box, sans doute trop agressif/QOTSA pour être inclus sur l'album lui-même.


L'impression est mitigée, mais positive. Par rapport au premier album, les morceaux sont sans doute moins immédiats, moins mémorables. Mais il faut tenir en compte qu'il s'agissait plus d'une collection de morceaux souvent co-écrits qu'un album solo cohérent, ce qu'est largement Out of Our Minds. La production est aussi différente, passant de l'altergrunge dépassé à une prod plus léchée, plus précise et nettement plus fouillée. De plus, Out of Our Minds mériterait certainement d'être écouté en contexte avec les autres composantes du projet, ce qui n'a pas été le cas ici. On pourrait donc dire qu'il représente le vrai premier album de Melissa Auf der Maur, et pour cela, on espère qu'il ne faudra plus six ans pour entendre la suite. De toute façon, Courtney Love n'a jamais eu le niveau.


lundi 19 avril 2010

Blur – Fool’s Day


Pour une surprise, c'était une surprise. Aux dernières nouvelles, Blur était de nouveau en pause, sans projet à venir. Leur petite tournée estivale, suite à une reformation très attendue, fut énorme : deux Hyde Park remplis, un Glasto triomphant, deux albums live et une compile qui leur faisait enfin honneur. Néanmoins, les quatre membres ne semblaient pas vouloir donner suite à l'aventure, ayant tous d'autres activités : Damon Albarn et Graham Coxon sont toujours dans la musique, Alex James, lui, fait du fromage tandis que Dave Rowntree est devenu avocat et politicien.

L'annonce de Parlophone, en début de semaine dernière, venait donc vraiment de nulle part. À l'occasion du Record Store Day (samedi 17 avril), journée de promotion des disquaires indépendants, le label de Blur édite un vinyl simple face, avec rien de moins que le premier nouveau morceau de Blur depuis 2003 et le premier single avec le guitariste d'origine Graham Coxon depuis 1999. Le vinyl est sorti en édition limitée (1000 exemplaires), ce qui a forcément créé une frénésie quelques heures avant l'ouverture des magasins, et une fameuse activité sur eBay également. C'est pour cela que le groupe a décidé de mettre le morceau à disposition, gratuitement, sur le site officiel du groupe, et en format .wav, s'il vous plaît. Tout le monde peut donc écouter le premier morceau du Blur original depuis plus de dix ans.

Fool's Day commence par un beat sec de Dave Rowntree et une boucle de guitare acoustique. La voix de Damon Albarn arrive quelques mesures plus tard, et on peut déjà en tirer deux conclusions : Albarn a adopté un ton de voix proche de The Good The Bad and The Queen, tout en accentuations londoniennes et il retourne enfin (pour Blur) à un de ses thèmes de prédilection, l'observation et la description de la vie de tous les jours, en l'occurrence la sienne.

On comprend vite le sujet du morceau et son titre : il raconte simplement la journée de Damon Albarn, le 1er avril 2010, jour où il va enregistrer un morceau qui s'appelle... Fool's Day. On suit Damon au réveil (il a rêvé d'un accident d'avion), il allume (forcément) la tv, se sert un café : "another day on this little island". Tout cela est typiquement Blur, certes, mais un vieux Blur, celui de Parklife, qu'on pensait oublié suite aux expériences de Blur, 13 et Think Tank. Musicalement, le premier couplet est assez minimaliste : le beat, la basse ronflante de James, quelques accords secs de Coxon et parfois, une couche de claviers.

Le second couplet nous plonge totalement dans l'anglophilie d'Albarn : il mange du porridge, il emmène sa fille à l'école en passant à côté de Woolworths. Prend le métro, jette un oeil au Westway (l'autoroute, rendue notamment célèbre par Clash), mais c'est en vélo que Damon se rend au boulot, en passant par Ladbroke Grove (où se trouve les locaux de son label world Honest Jon's). Et ce sont ces quatre vers qui seront probablement disséqués par des critiques et fans en quête d'indice sur la prolongation de l'activité de Blur.

Albarn se rend donc en studio, où se passent quelques "forthcoming dramas", qui n'ont que peu d'importance, car ils sont là "for the love of all sweet music." Albarn achève : "we just can't let go". Si ce n'est pas un message définitif sur le fait que Blur ne peut simplement pas, plus, s'arrêter d'exister, alors, je ne sais pas ce que c'est.

Après ce "let go" répété, la guitare de Coxon prend une allure étonnante, qui rappelle carrément les débuts baggy du groupe et l'album Leisure, avec évidemment des années d'expérience en plus. Albarn commence son dernier couplet, qui est nettement plus généraliste : on ne parle plus que de la vie rangée londonienne d'Albarn, mais aussi, par la même occasion, de la condition existentielle occidentale passée sous le tamis du socialisme cher à Albarn : "so meditate on what we've all become", "civil war is what we all were born into, raise your left hand, right, sing", "don't capitulate to the forces of the market place", et, le plus important de tous : "consolidate the love we've had together". Après un dernier rappel du thème ("a cold day in springtime"), les guitares de Coxon peuvent se lâcher : sous un fond d'orgue carnavalesque, d'accords répétés et de feedback, le motif à la Leisure se répète pendant une bonne minute, devenant facilement une de ses récentes performances les plus mémorables.

Trois minutes vingt-sept secondes, pas de refrain, une mélodie simple, une performance fantastique de Coxon et un morceau très riche : pas de doute, c'est Blur, et il ne faut absolument pas qu'ils en restent là.