samedi 31 décembre 2011

Mon année 2011, dernière partie + playlist Spotify

Voilà, 2011, c'est (presque) terminé. Encore deux petites choses avant de clôturer cette année, la huitième de Music Box. D'abord, je n'ai absolument pas pu/voulu classer mon top 5 de l'année, qui apparaît donc ici par ordre alphabétique. Pourquoi? D'abord parce que, comme déjà écrit auparavant, je n'aime pas la compétition, les classements et les listes, mais aussi parce que chacun des cinq albums qui suivent ont tous été, à un moment donné, mon album préféré de l'année.


Ensuite, j'ai compilé un (une?) playlist Spotify avec cinquante morceaux qui résument assez bien ce qui a été cette année, pour moi. Ici aussi, les morceaux sont présentés alphabétiquement, donc le mode aléatoire est très chaudement recommandé.


Voici donc mes cinq albums préférés de l'année. See you next year!


Arctic Monkeys - Suck It And See





Oui, j'aime peut-être Arctic Monkeys un peu trop. Et alors? Je constate que depuis leurs débuts fracassants, ils n'ont jamais cessé d'évoluer, et leur quatrième album est peut-être leur plus cohérent, à la croisée des trois précédents et d'un sens mélodique inné. On n'oubliera pas d'évoquer non plus les prouesses lyriques d'Alex Turner, pour qui le cliché "meilleur parolier anglais depuis Morrissey" est probablement exact, mais sans oublier l'évolution tout aussi constante des musiciens. On connaissait déjà ce que le batteur Matt Helders était capable de faire, on découvre ici encore un peu plus les lignes de basses complexes et maîtrisées de Nick O'Malley. Puisqu'il faut trouver quelque chose, on regrettera peut-être la présence du stupide Brick by Brick, mais Arctic Monkeys n'en a jamais fait qu'à leurs têtes, et placer un tel morceau comme premier extrait de l'album quelques mois avant sa sortie, était une nouvelle tentative, réussie, de brouillage de pistes. Rarement un groupe aura été aussi bon après quatre albums (Standing on the Shoulder of Giants?), et le groupe ne semble pas vouloir s'arrêter en si bon chemin. Probablement le meilleur groupe rock moderne actuel.


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The Joy Formidable - The Big Roar


J'ai écouté The Joy Formidable par curiosité, après avoir lu une comparaison avec Nirvana et My Bloody Valentine. Étrangement, la comparaison est valable : le power trio gallois alliant la puissance brute des premiers avec le maelstrom sonore des seconds. Mais ils sont bien plus que ça, que ce ne soit que grâce à la personnalité et la voix de la minichanteuse Ritsy Bryan. Un premier album très abouti, puissant et confiant, qui donne beaucoup d'espoir dans un avenir pourtant semé d'embûches. Mais ça, ils le savent probablement très bien. En attendant le syndrome du second album, le premier a bien mérité sa place cette année. Puis, Dave Grohl aime bien, qui suis-je pour le contredire?


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J Mascis - Several Shades of Why




J Mascis est un des plus fantastiques guitaristes de tous les temps, et je n'essaierai même pas d'argumenter. Il joue aussi très très fort. Quand on a su qu'il sortait un album solo majoritairement acoustique, on pouvait se poser des questions. C'était sans compter sans l'autre énorme talent de J : sa voix. Sous-évaluée derrière sa cape de guitar hero, elle est capable de transporter au moins autant d'émotions que sa Fender Jaguar. Et quand Mascis utilise ces deux talents au service de chansons superbement écrites, et parfois relevées de collaborations aussi efficace que discrètes (Kurt Vile, Ben Bridwell, Kevin Drew), on arrive sans peine à un des plus beaux albums de l'année, et un des plus chargés en émotion. Tout cela (presque) sans guitare électrique...


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Wild Flag - Wild Flag


Un nouveau groupe qui envoie toutes guitares dehors des mélodies somptueuses et des morceaux très entraînants. On ajoute à cela une alternance entre les deux vocalistes qui empêche toute lassitude, et on arrive à un des meilleurs premiers albums de l'année. Mais alors, pourquoi est-ce qu'on n'a pas encore plus parlé d'un groupe qui semble être une valeur à suivre pour l'avenir du rock? Probablement parce que même s'il s'agit du premier album de Wild Flag, ses membres ne sont pas inconnus du tout, ayant sévi dans Sleater-Kinney (Carrie Brownstein et Janet Weiss) ou encore Helium (Mary Timony). Qu'importe, Wild Flag nous a tout simplement livré un des meilleurs albums de rock de l'année. Oui, c'est sans doute assez classique, elles ne réinventent pas la roue, mais elle n'a jamais eu besoin d'être réinventée non plus. Le ton des guitares est fantastique, la batterie percutante, et comme pour Sleater-Kinney, il n'y a pas de basse mais un clavier qui ajoute une dimension supplémentaire (mais discrète) au son. Et ça fait beaucoup du bien. Rock 'n roll is dead, right? RIGHT?


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Yuck - Yuck


Bon, je plaide coupable. I'm a child of the nineties, et tout ça, c'est exactement le piège dans lequel je peux tomber. Dinosaur Jr, My Bloody Valentine, Pavement, Teenage Fanclub et j'en passe, Yuck ne fait que recopier tout ce que leurs ainés ont fait. Suicide Policeman est la plus belle chanson qu'Elliott Smith n'a jamais écrit, Operation est quasi une reprise de Teen Age Riot. Mais ils le font si bien, avec une production lofi pourrie et une guitare Mascisesque à souhait, que je ne peux rien leur reprocher. L'avenir nous dira si leur attitude slacker et leur collection de vieilles pédales pourries ne sont que des gimmicks opportunistes, mais ici et maintenant, c'est un de mes albums préférés de l'année, et un de ceux que j'ai le plus écouté.


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vendredi 30 décembre 2011

Mon année 2011, troisième partie

Vingt albums pour résumer une année si riche, c'est peu. Ce n'est pas parce que j'ai très peu écrit (un "record", depuis 2003) que je n'ai rien écouté, heureusement. Beaucoup d'autres albums méritaient au moins une mention, sinon une chronique. D'abord, les EP. J'aime beaucoup les EP, parce que j'aime quand les albums sont courts, souvent. Cette année nous a amené quelques excellents EP, comme ceux de Trash Talk (six minutes de pure perfection hardcore), de Future of the Left (qui annonce un album l'an prochain), du projet de Shaun Lopez et Chino Moreno Crosses, des reformés et toujours excellents Chokebore et évidemment d'Alex Turner, dont la courte BO du film Submarine aura apporté à cette année ses moments les plus tendres. Mais on n'oubliera pas non plus les albums de Black Box Revolution (bien qu'ils n'ont pas évolué du tout), des Black Keys (idem), des Kills (idem), des écorchées vives EMA et Zola Jesus, de Battles (moins expérimentaux qu'avant, mais plus fun), des Raveonettes quand même, d'Art Brut (que ce ne soit que pour les paroles d'Eddie Argos), de dEUS et Jane's Addiction (mieux que le précédent, mais moins bien qu'avant), de Stephen Malkmus qui se l'est jouée Pavement, de Thurston Moore qui se l'est jouée acoustique (tous deux produits par Beck) et j'en passe et certainement des meilleurs, comme Girls, dont j'ai vraiment beaucoup aimé le single Vomit, mais le reste, j'ai du mal. Ou encore Destroyer, que j'aurais certainement inclus dans le top si je l'avais écouté plus tôt. Mais bon.


(edit : et je viens de découvrir St. Vincent, trop tard...)


Ceci dit, voici la troisième partie du top 20, de 10 à 6. Prochain épisode demain avec le top 5 et la playlist Spotify très fourre-tout.


10 Iceage - New Brigade



L'autre côté du punk moderne. Contrairement à l'overdose de Fucked Up, l'album ne dépasse pas 25 minutes (12 morceaux) durant lesquelles on ne sait jamais si la balance va tomber sur le mot "post" (la reverb, les guitares angulaires) ou plutôt sur le mot "punk" (le rythme, les paroles scandées souvent inintelligibles). Je la fais tomber sur le mot fantastique, parce que ces jeunots (18 ans) danois ont réalisé le brûlot de l'année : incandescent, coruscant, très intense et hautement recommandé.


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9 Cloud Nothings - Cloud Nothings


Tiens, encore un peu de lo-fi. Cloud Nothings, c'est Dylan Baldi, un jeune homme très talentueux capable d'écrire des popsongs parfaites avec trois bouts de ficelle. Il me fait un peu penser à Harlem, l'an dernier. Très ensoleillé, l'album, forcément court, est une bien agréable bouffée d'air frais, entre morceaux enlevés un peu simples mais efficaces et superbes balades mélancoliques. On n'est pas dans l'expérimentation, bien entendu : deux accords, une pédale fuzz, une batterie sèche et une voix pas trop assurée. Mais que vouloir de plus? Réponse : un prochain album produit par Steve Albini (!) qui sort dans même pas un mois.


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8 Rival Schools - Pedals


Il aura fallu dix ans à Walter Schreifels, Ian Love, Cache Tolman et Sammy Siegler pour produire une suite à United by Fate, album culte d'un groupe qui l'était devenu suite à sa très longue pause. Contre toute attente, Petals est au moins aussi bon. Il est en tout cas plus varié, passant de moments limite pop (69 Guns) au postemohardcoremachin qui leur sied si bien (Eyes Wide Open). Terribles mélodies, production parfaite (Ian Love a passé ces dix ans à enregistrer et produire) et la voix inimitable de Schreifels pour un album court et excellent de bout en bout. Seul problème? Le guitariste Ian Love est déjà reparti. Et même si Rival Schools compte continuer en trio, rien ne sera plus jamais comme avant. Mais ces deux albums resteront pour toujours.


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7 Josh T. Pearson - Last of The Country Gentlemen



La claque de l'année. Josh T. Pearson est l'ancien chanteur/guitariste/poète maudit de Lift to Experience, et sur son premier album solo, il livre son âme. Gros cliché? Non, il livre véritablement son âme. Accompagné d'une seule guitare acoustique (et de cordes arrangés par Warren Ellis) il chante/parle en flux de conscience, en n'ayant littéralement rien à foutre. Aucune tentative de faire rimer ses phrases, aucun effort de rester bref (certaines chansons dépassent allégrement les dix minutes, dix minutes d'un type seul avec sa guitare, je répète) et aucun essai de diluer son personnage, qui apparaît comme le plus sombre pauvre type depuis le Rivers Cuomo de Pinkerton. Mais Pearson le fait avec une telle honnêteté qu'il a réussi, avec cet album, à faire avancer la science : j'ignorais qu'il était possible de rester bouche ouverte sans respirer pendant treize minutes.


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6 PJ Harvey - Let England Shake



J'ai souvent eu du mal à vraiment rentrer dans l'univers particulier de PJ Harvey, pour des raisons que je n'arrive pas vraiment à expliquer. Mais Let England Shake, qu'on le veuille ou non, est un grand album. Composé majoritairement à l'autoharpe, il évoque l'état passé, présent et futur d'Albion, ce qui lui confère un caractère intemporel. Album étrange, inhabituel, riche et dense, Let England Shake est exceptionnel, dans tous les sens du terme, et apportera quelque chose de plus à chaque écoute, récompensant ainsi l'auditeur attentif, notamment aux paroles.


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lundi 26 décembre 2011

Mon année 2011, seconde partie

Chaque année apporte son lot de bonnes surprises, mais aussi de déceptions. 2011 aura vu, une fois de plus, un paquet de vieilles gloires se reformer (Soundgarden, Pulp, Suede, Stone Roses et environ trois millions d'autres) mais on attend toujours du nouveau matériel pour la plupart d'entre eux, qui se contentent de se la jouer Pixies. En ce qui concerne les vieilles gloires qui elles, ont sorti de la nouvelle musique, le bilan n'est pas très réjouissant. Red Hot Chili Peppers, Incubus, Korn, Limp Bizkit : moins on parle de leurs nouvelles productions, mieux c'est. D'autres ont été moins mauvais, mais sans plus : le retour de Blink-182 était très dispensable, et la somme de Beady Eye et de Noel Gallagher's High Flying Birds ne vaut clairement pas Oasis. Mention encore plus spéciale à Coldplay, qui continue à réinventer le concept du c'est-pas-un-plagiat-mais-un-hommage et, naturellement, l'exploit olympique de Lulu. On aura aussi pu être déçu de tous ces groupes dont on nous promettait monts et merveilles, et qui n'auront juste tenu que le temps d'une couverture du NME, avant la sortie de leur album, évidemment. WU LYF (dont l'album n'est pas mauvais, mais...), (Viva) Brother, Frankie and the Heartstrings ou les Vaccines s'y reconnaîtront. Enfin, d'un point de vue purement personnel, je n'ai pas accroché à M83, et je ne supporte toujours pas Bon Iver, désolé.


Voici maintenant le second quart du "classement" de mes albums préférés de 2011, de 15 à 11.


15 Dum Dum Girls - Only In Dreams


J'aime beaucoup les Raveonettes, mais force est de constater que les Dum Dum Girls, produites par Sune Rose Wagner (et Richard Gottehrer, évidemment) ont dépassé le maître cette année. On a beau avoir eu ce qu'on attendait d'elles, on est positivement surpris par la relative variété de l'album, dans un contexte (shoegaze pop vaguement éthéré) assez restreint. Mention spéciale à l'hypnotique Bedroom Eyes, mais l'album, court, ne souffre d'aucun point faible. On notera aussi l'EP He Gets Me High, sorti plus tôt dans l'année et d'excellente facture également. D'ailleurs, vu que l'album n'est pas dispo sur Spotify, c'est l'EP qui est en lien ci-dessous.


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14 Fucked Up - David Comes to Life


The Shape of Punk To Come, qu'ils disaient. Le punk, en 2011, c'est ça (et les jeunes du numéro 10, on y arrive) : à savoir prendre les règles, les mettre dans une boîte, sauter dessus à pieds joints et puis la poignarder. Ce qui, finalement, n'a pas vraiment changé en 25 ans ; ce qui a changé, c'est l'application. Fucked Up a sorti un album très, très long (pas aussi long que Lulu, mais long quand même), avec aucun temps mort, et, qui plus est basé sur un concept que je pourrais vous raconter si j'avais réussi à suivre le flot incontrôlable éructé par Damian "Pink Eyes" Abraham pendant une heure et vingt minutes qui cognent fort. Trop fort, d'ailleurs, on pourrait parfois rechercher un peu d'air, et un peu de variété. Mais hey, punk rock. Green Day ce n'est pas.


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13 Beastie Boys - Hot Sauce Committee Part II


On l'aura attendu, cet album. Le trio new-yorkais n'a jamais été pressé (ce n'est jamais que leur troisième album en treize ans, si l'on exclut l'instrumental The Mix-Up), mais le cancer d'Adam Yauch a reporté l'album de plus d'un an. L'attente aura largement valu la peine : HSC2 (le 1 n'existera probablement jamais, comme ils sont drôles) est un excellent album d'un groupe qui n'aura de toute façon jamais été mauvais. Mais de là à être si bon, il y avait une marge, facilement franchie. Samples adéquats, flows inspirés, passages instrumentaux (une majorité de "vrais" instruments) tantôt secs, tantôt planants , une sorte de Sabotage du vingt-et-unième siècle (Lee Majors Come Again) et du tube (Don't Play No Game That I Can't Win) : il y a à boire et à manger, mais rien à jeter. Très impressionnant.


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12 Radiohead - The King of Limbs


AKA the Twitter album. Il est sorti tellement vite, 24 heures avant la date prévue, que tout le monde s'est jeté dessus pour être le premier à en parler. Sauf que tout ce petit monde s'est rendu vite compte qu'il s'agissait de l'opus le plus sombre, le plus expérimental et le moins immédiat de toute leur carrière. Les reviewers plus rapides que leur clavier en ont déduit qu'il n'y avait pas de guitare (il y en a sur chaque morceau, ou presque) et qu'il allait forcément y avoir très vite une suite, on n'allait quand même pas n'avoir que ça. Si on essaie de s'élever un peu au dessus de cet océan de médiocrité, on se rendra compte que TKOL est un album captivant, qui fonctionne comme une unité difficilement divisible, et qui comprend quelques terribles moments de brillance. Et pour ceux qui regrettent un Radiohead un peu plus traditionnel (pas celui de The Bends, quand même), le récent single Staircase/The Daily Mail est à conseiller. Pour ce qu'il est, The King of Limbs est un bon album, mais très insaisissable.


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11 Kurt Vile - Smoke Rings for My Halo


Kurt Vile rend la vie facile. Tout a l'air si simple, pour lui. On a vraiment l'impression qu'il s'assied dans un fauteuil, sort sa guitare, démarre son 4-pistes, et voilà. Springsteen/Young/Dylan post-quelque chose, version bedroom lo-fi. Superbes mélodies, un jeu de guitare aérien et une voix forcément pas trop assurée, à mi-chemin entre ces parangons du brol bricolé que sont Thurston Moore et Graham Coxon. On risque parfois de tomber dans la neurasthénie, mais peut-être qu'un jour, Kurt Vile nous fera un vrai album, bien produit et tout ça. Et on regrettera celui-ci. Très fort.


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La suite bientôt, avec en plus les oubliés de ce classement.

samedi 24 décembre 2011

Mon année 2011, première partie

Drôle d'année, 2011. Beaucoup de buzz pour pas grand chose, des retours fracassants et d'autres complètement fracassés, des gros groupes qui n'en finissent pas de décevoir, des valeurs sûres qui prennent des risques payants, et des trucs populaires/hype que je continue à ne pas supporter. Sur un plan personnel, j'ai perdu un ami cette année, qui était aussi un de mes lecteurs les plus fidèles, et une source d'inspiration constante. Sa disparition est certainement une des raisons pour lesquelles j'ai très peu écrit cette année, mais elle m'a aussi permis de faire la connaissance de personnes qui m'ont aussi permis de découvrir pas mal de trucs, et d'en discuter, de les apprécier. Le cycle de la vie, je suppose. Trève de blabla, comme je n'aurai pas foutu grand chose cette année, je profite de cette fin 2011 pour faire un top 20 argumenté, histoire de faire d'une pierre deux coups. Chaque album (ou presque) est disponible en écoute sur Spotify, et, évidemment, le classement est totalement subjectif et personnel. Je n'ai pas tout écouté cette année, et il n'y a aucune raison qu'un album soit mieux classé qu'un autre, c'est de l'art, pas une compétition sportive quelconque. Il vaut donc mieux ne pas accorder d'importance aux places, et simplement écouter la musique.


On commence avec les places 20 à 16.


20 The Vaccines - What Did You Expect from the Vaccines?



Les Vaccines allaient sauver le rock 'n roll, évidemment. On n'avait plus entendu un tel buzz depuis les Strokes, il y a maintenant dix ans. On en est bien loin : leur premier album est passable sans plus, leur attitude de faux punks/vrais fils à papa est assez méprisable, et leur tendance à mal copier plus ou moins n'importe qui est pitoyable (on laissera le sexisme primaire pour une autre fois). Mais quand on fait les comptes d'une année 2011 où AUCUN des quarante singles les mieux vendus au Royaume-Uni ne provient d'un "groupe à guitare", on se met à espérer qu'un groupe valable se dise qu'il peut faire bien mieux que ça. C'est pour ça qu'il mérite une place dans le top 20, même si au moins 370 albums de 2011 sont meilleurs que celui-ci.


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19 R.E.M. - Collapse Into Now



Parce qu'on n'aura plus jamais l'occasion d'inclure un album de R.E.M. dans un top 20. Parce que, lors de ma chronique initiale, j'écrivais que R.E.M. est un groupe dont on veut qu'il ne se sépare jamais. Parce que Collapse Into Now est un bon résumé de leur carrière, un peu de tout, lent, rapide, pop, rock, et parfois n'importe quoi. Parce que c'est R.E.M., quoi.


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18 Miles Kane - Colour of the Trap


Où Miles Kane devait sortir de l'ombre d'Alex Turner, après moultes collaborations et un projet parallèle. Le succès est au rendez-vous : Colour of the Trap est un album classieux, influencé swinging sixties mais quand même personnel et varié. Kane développe sa propre voix, qui n'est pas mauvaise du tout, on attend juste qu'elle s'émancipe encore un peu plus. Parce que Turner a quand même coécrit la moitié de l'album.


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17 Algernon Cadwallader - Parrot Flies


Certains genres musicaux évoluent bien plus qu'on ne pourrait le croire. Non, l'emocore n'est pas mort, il a juste pris une forme nettement plus inventive et moins irritante. Revendiquant clairement l'influence emo dans la voix (et quand je dis emo, je ne parle pas de Twilight, hein, plutôt de Far, Sunny Day Real Estate, etc.), Algernon Cadwallader envoie le genre dix ans dans le futur avec un jeu de guitare époustouflant et terriblement inventif rappelant autant les méandres géniaux de Stephen Malkmus que les solos d'une note de Neil Young (le terrible premier morceau, Springing Leaks), le tout produit chez Sub Pop. Et tant qu'à faire dans les comparaisons glorieuses des années 90, Robert Pollard aimerait bien avoir toujours autant d'idées excellentes (en moyenne 17 par morceau, Pollard, il fait quinze albums avec ça). Et les mélodies? Si Brian Wilson avait entendu Parrot Flies, il n'aurait jamais voulu retrouver les Beach Boys (façon de parler, son banquier l'aurait convaincu, crise financière et tout ça). Soit, Parrot Flies est un album étonnant et détonnant, dense et chargé émotionnellement mais reste, oui, fun. Une bête étrange, et une jolie découverte personnelle (merci MDEIMC!).


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16 Foo Fighters - Wasting Light



Dave Grohl, il est fort, très fort. Wasting Light a été enregistré dans son garage, directement sur bande, sans ordis, produit par Butch Vig, et avec une apparition de Krist Novoselic. Il le répète tout le temps, à n'importe qui. Finalement, l'album de punk garage abrasif n'aura été qu'un disque de rock contemporain, légèrement mieux que les dernières productions des FF, mais bien loin d'une oeuvre de génie. Reste que Grohl sait écrire d'excellents morceaux (même si trop de pré-refrains tuent le refrain), et la triple guitar arrack (Shiflett - Smear - Grohl) fait parfois très mal (Bridge Burning). Certainement pas un mauvais album (Arlandria, Dear Rosemary comptent parmi leurs meilleurs morceaux), mais l'excitation atteinte à sa sortie est vite retombée.


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La suite (plus ou moins) demain, avec un peu de blabla sur mes déceptions de l'année.

samedi 26 novembre 2011

Pay a Blogger Day + Flattr

Je n'ai plus parlé de Flattr depuis un bout de temps maintenant, et la semaine prochaine, c'est Pay A Blogger Day. L'occasion est donc toute trouvée pour reparler de Flattr et remettre le sujet à jour.


Tout d'abord : l'article dans lequel je présente Flattr est ici, et date déjà du 5 septembre 2010. Comme les choses ont un peu changé depuis, je vais vous refaire un petit tour de la question.


Flattr est un service de micro-donations. Chaque bouton Flattr que vous pouvez voir sur cette page et ailleurs sur le web fonctionne comme un bouton Facebook Like, Twitter, etc mais avec une particularité : si vous le souhaitez, et donc, si vous avez alimenté votre compte Flattr avec de l'argent, chaque clic rapportera une fraction de cette somme d'argent à l'auteur du contenu où se trouve le bouton. Pas clair? Un exemple, totalement pris au hasard : vous avez lu mes articles (merci), vous les appréciez (merci!) et vous désirez montrer cette appréciation en me donnant du vrai argent (merci!?). Avant, la seule solution était Paypal. Mais la procédure était lourde, et les frais importants. De plus, l'image de marque de Paypal a été récemment écornée par l'affaire Wikileaks et plus récemment par le blocage des donations au projet Diaspora*. C'est alors que Flattr entre en piste.


Vous pouvez créer un compte Flattr aussi facilement que n'importe quel compte de forum ou de réseau social, puis vous ajoutez une somme d'argent au choix (via Paypal, Moneybookers, une carte de crédit ou même un virement), et vous décidez d'allouer une partie ou toute cette somme au mois en cours. Ensuite, vous cliquez sur les boutons Flattr des articles qui vous plaisent, ici ou ailleurs sur le web, et en fin de mois, le montant que vous avez choisi de donner est divisé par le nombre de clics, et l'argent se retrouve alors sur le compte Flattr du créateur de contenu.


Exemple chiffré : vous décidez d'allouer 5€ à Flattr pour le mois de décembre. Pendant tout le mois de décembre, vous cliquez sur dix boutons Flattr. À la fin du mois, Flattr retire 10% de frais de fonctionnement : il reste donc 4,5€ divisé par le nombre de clics. Chaque clic effectué rapporte donc 45 centimes à la personne qui a créé le contenu. En imaginant (pourquoi pas!) que vous avez cliqué sur dix de mes articles, et je recevrai, debut janvier, 4,5€ de votre part, via Flattr. Je peux alors utiliser cet argent pour moi-même "flatter" d'autres personnes, ou transférer l'argent sur mon compte bancaire.


Est-ce que ça marche? Question de point de vue. Non seulement la culture internet du "tout gratuit" n'incite pas au paiement (les exemples des paywalls et des abonnements de type Spotify pourraient faire changer la donne, mais cela reste à voir), mais en plus Flattr reste très méconnu en francophonie, contrairement à l'Allemagne, par exemple, où il est fortement développé. Les clics Flattr m'ont environ rapporté 30€ depuis un peu plus d'un an, et je tiens à systématiquement réinjecter au minimum la moitié de la somme qui m'est donnée, voire l'entièreté si elle est inférieure à 2€. Donc, ce n'est évidemment pas beaucoup d'argent, et cela ne couvre même pas les frais de fonctionnement de Music Box, mais cela reste très appréciable.


Depuis mon premier article sur le sujet, Flattr a ajouté deux fonctions utiles. Si (toujours par exemple, bien entendu) mon blog vous plaît, et que vous aimeriez le flatter tous les mois, il existe un système d'abonnement : il suffit de cliquer une fois puis une seconde sur un bouton Flattr (par exemple, celui dans la colonne de droite) pour vous abonner pour 3, 6 ou 12 mois : le clic se fera alors automatiquement, sans risque d'oubli de votre part. Ensuite, il est maintenant possible de donner un montant précis : vous voulez (toujours par ex... ok, on a compris) me donner, allez, 1707€, vous pouvez cliquer ici, faire la transaction, et attendre un remerciement humide et ému de ma part (voire un vieux cd promo en cadeau, j'en ai plein).


Je vous parle de tout cela maintenant, parce que mardi prochain, le 29 novembre, c'est la journée Paie un Bloggeur ("Pay a Blogger Day"). Vu qu'on a des journées pour littéralement n'importe quoi, de nos jours, pourquoi pas pour ça. L'idée est simple : si vous aimez ce que vous lisez, alors, pourquoi ne pas permettre au bloggeur de s'acheter un café, une place de concert, un abonnement mensuel à Spotify ou que sais-je encore (j'en profite pour édicter mes deux principes de base : l'argent récolté par Flattr sera toujours utilisé en rapport avec le site + il n'y aura JAMAIS de pub sur Music Box).


Donc, si jamais l'envie vous prend, n'hésitez pas à vous inscrire sur Flattr (outre Music Box, vous pouvez supporter des centaines de blogs, sites et organisations caritatives, en étant certain à 100% que l'argent, votre argent, arrive à bon port) et à donner un petit peu d'argent (comme vous avez pu voir, cela peut vraiment être un petit peu) aux blogs que vous lisez régulièrement.


Mais surtout, continuez à les lire, à nous lire. Merci.

mardi 22 novembre 2011

R.E.M. - Part Lies, Part Heart, Part Truth, Part Garbage 1982–2011

R.E.M., c'est donc fini. Jusqu'à l'inévitable réunion lucrative, disent déjà les plus cyniques. Peut-être, on verra bien. Mais là, maintenant, R.E.M. a tiré un trait sur trente ans de carrière à l'aide de cette compilation qui se veut, pour la première fois, complète. En effet, les précédentes compiles du quatuor devenu trio d'Athens, Georgia étaient éditées par l'un ou l'autre de leurs deux labels successifs, IRS et Warner. Part Lies ... relie les deux périodes, avec treize extraits IRS et vingt-sept Warner, dont trois inédits.


Forcément, on parle ici d'une compile grand public récapitulative d'une carrière qui a débuté en 1982. Elle se devait donc de reprendre leurs plus grands succès (oui, y compris Shiny Happy People) et se concentrer sur les périodes les plus fructueuses du groupe en termes de succès commercial. On aura donc beaucoup d'extraits de GreenOut of Time et Automatic for the People, mais nettement moins des albums post-1992, dira-t-on. Mais chaque album du groupe est représenté, et si l'on pourra facilement chicaner sur l'absence/présence de l'un ou l'autre morceau, le tracklist semble assez satisfaisant.


L'écoute de l'album, structuré chronologiquement, permet aisément de suivre l'évolution du groupe. Leurs débuts "college rock", où les paroles de Michael Stipe étaient alors absolument incompréhensibles. Leur arrivée chez Warner, et ensuite l'accumulation progressive de hits : Losing My Religion, Shiny Happy People, Everybody Hurts, Man on the Moon. Leur installation dans le rock contemporain comme un des plus gros groupes du monde, et la sortie régulière d'albums qui ne feront plus trop parler d'eux, jusqu'au très musclé Accelerate et le tout dernier, Collapse Into Now. C'est d'ailleurs une des idées préconçues les plus solides sur R.E.M : qu'ils ne font plus rien de bon depuis dix, quinze voire vingt ans. S'il est vrai qu'ils ont connu une période creuse en ce qui concerne la qualité de leurs albums, ils ont à chaque fois réussi à sortir quelques popsongs fantastiques lors de leur troisième décennie, comme le sous-estimé Leaving New York, Imitation of Life ou encore The Great Beyond et Bad Day. Mais on retiendra surtout de R.E.M. cette faculté de créer des atmosphères souvent fort particulières, sans (presque) jamais céder aux modes. L'étrange, inquiétant et méconnu New Adventures in Hi-Fi en est un parfait exemple.


On pourrait aisément parler de chacun des quarante morceaux présents ici, mais analyser R.E.M est aussi futile que tenter de déchiffrer les paroles de Gardening at Night. R.E.M. est incontestablement un des groupes rock les plus importants de l'histoire. Alors, est-ce qu'il a toujours mérité son statut? Est-ce qu'il est un des meilleurs groupes depuis que Les Paul a créé la guitare qui porte son nom? R.E.M. n'a jamais vraiment poussé les limites de la composition musicale, a connu quelques périodes creuses, mais restera toujours, au moins, un bien bon groupe rock. Ceci en est son anthologie. Libre à chacun de pousser la découverte ou l'approfondissement dans les quinze albums studio du groupe, où on trouvera, effectivement, un peu de déchet, mais beaucoup de coeur. Farewell.


Spotify : R.E.M. - Part Lies, Part Heart, Part Truth, Part Garbage 1982–2011

dimanche 6 novembre 2011

Manic Street Preachers - National Treasures : The Complete Singles

Une compilation des singles des Manic Street Preachers ne pouvait qu'être à l'image du groupe : imparfaite, excessive et passionnante. Imparfaite, parce que même si elle est censée être complète, elle ne l'est pas : les deux premiers singles (Suicide Alley et New Art Riot) sont absents, ainsi que deux doubles faces A (Repeat et PCP). Enfin, on ne pourra que regretter l'absence d'extraits du fabuleux Journal for Plague Lovers, mais vu qu'aucun single n'en était extrait, cela se justifie. Excessif, parce qu'on a quand même trente-huit morceaux (Charts UK : 33 consécutifs dans le top 40, dont deux n°1 et quinze top 10) dont huit provenant de la période entourant leur premier album, Generation Terrorists. La littérature racontant l'histoire très troublée du groupe est abondante, on se concentrera donc le plus possible sur la musique. C'est alors qu'on arrive au troisième adjectif : passionnante.


En vingt ans de carrière, il n'y a pas grand chose que les Manics n'ont pas fait. Citons en vrac : déclarer que le groupe se séparera après avoir vendu dix millions d'exemplaires de leur premier album (ni l'un ni l'autre ne se produira), sortir un des albums les plus intenses, sombres et inflexibles du rock contemporain (The Holy Bible) puis perdre (littéralement) un membre du groupe et sortir ensuite un autre album (Everything Must Go) qui leur offrira un succès populaire qui semblait inimaginable un an auparavant. Quoi d'autre? Suivre ce disque d'un autre dans la même veine, choper deux premières places des charts anglais puis partir à Cuba, jouer devant Castro et créer un album long, complexe et tellement inégal que comparé à Know Your EnemyBe Here Now serait du Minor Threat. Le suivre d'une collection de "pop élégiaque", de "Holy Bible pour quarantenaires" qui sera en fait un album embarrassant de maladresse. Et enfin, retrouver un succès commercial de nouveau perdu pour mieux l'enfouir dans un album sans singles, produit par Steve Albini et aussi claustrophobe que The Holy Bible, pour finalement revenir avec "une dernière tentative de communication de masse".


National Treasures suit chronologiquement ce chemin, des débuts surexcités et ambitieux imitant autant Guns 'N Roses (Slash 'n' Burn) que les Clash (You Love Us) avec une première perle : Motorcycle Emptiness, un des classiques du rock anglais des années 90. Le second album (Gold Against The Soul) verra le groupe canaliser ses ardeurs au format radio, en produisant quatre singles alliant qualités commerciales à un son sans trop de compromis, et surtout, aux paroles vraiment différentes de ce que la Britpop de l'époque pouvait fournir. So far so very good, mais le troisième album ne rentrera plus du tout dans le format radio. Ce qui fait que les trois singles extraits de The Holy Bible sont bien loin d'être ses meilleurs morceaux. De toute façon, l'album est une oeuvre majeure qui ne peut pas être réduite à ce qui est présent ici, même si Faster est toujours aussi efficace.


Richey James Edwards disparaît sur les rives de la Severn, et les Manic Street Preachers décrochent leur premier mégahit (le toujours poignant A Design for Life), et deviennent un gros groupe. Les huit singles des albums Everything Must Go et This Is My Truth Tell Me Yours reflètent cette époque, mais avec un certain panache : If You Tolerate This Your Children Will Be Next est sans doute le seul n°1 évoquant la guerre civile espagnole en citant Woody Guthrie, Tsunami raconte une histoire sordide de viols et meurtres sur une musique qui aurait donné un hit à REM alors que Kevin Carter est le dernier single du groupe porté par des paroles de Richey ("The elephant is so ugly / He sleeps his head machetes his bed / Kevin Carter kaffir loves forever"). Mais comme toujours dans l'histoire du groupe, une action crée une réaction : The Masses Against the Classes, single hors album explose à 200 à l'heure le classicisme de This is My Truth, et l'album suivant, Know Your Enemy, marque le début de la troisième (au moins) période de la carrière des Manics : celle où on doit séparer nous-même le grain de l'ivraie. Parce que même si KYE comprend son lot de bons morceaux, ils n'ont pas vraiment été choisis comme single, Let Robeson Sing étant le plus pénible du lot.


On sait donc quoi faire pour la suite : on ignorera Lifeblood (le groupe lui-même l'a ignoré dès sa sortie, en ne reprenant que deux singles), on se dira que Your Love Alone Is Not Enough est "juste" une fantastique chanson pop, on regrettera que Jackie Collins Existential Question Time ne soit jamais officiellement sorti comme single, et on finira par penser que pour un dixième album, Postcards from a Young Man n'est pas mauvais. Même si, une fois de plus, les singles choisis sont discutables, tout comme le choix de l'inédit obligatoire, une reprise dispensable de The The.Naturellement, on n'est pas en présence d'un véritable best of : les morceaux ont été froidement choisis sur un seul critère, qui n'est pas celui de la qualité. Cependant, un véritable best of des Manics serait nécessairement imparfait : comment choisir parmi trois cent morceaux? Au moins, ici, on a l'avantage de l'objectivité, même si un second album de "deep cuts" aurait pu être intéressant et complémentaire. National Treasures et ses impressionantes contradictions doit être une porte ouverte vers un des plus intéressants groupes contemporains. Et pour l'amour de ce que vous aimez le plus, allez écouter The Holy Bible et Journal for Plague Lovers.


Spotify : Manic Street Preachers - National Treasures


lundi 24 octobre 2011

Noel Gallagher's High Flying Birds - Noel Gallagher's High Flying Birds

Dix ans, au moins, qu'on l'attendait. Dix ans que son auteur en parlait, généralement comme menace destinée à botter les fesses de son ptit frère, quand Big Brother n'était pas satisfait de son niveau d'implication au sein d'Oasis. Finalement, le premier album solo de Noel Gallagher sort dans des circonstances particulières, vu qu'il n'a plus de groupe. Oasis n'est plus (enfin, jusque 2015), ils sont partis former Beady Eye (au succès, disons, relatif) et Noel se retrouve, bizarrement, avec pas mal de choses à prouver. Notamment, dans un pays ou le rock 'n roll reste traité comme une compétition, prouver que son album est meilleur que celui du frangin. Comme souvent avec ce qui provient d'Oasis, la réponse n'est pas claire. Ce qui l'est nettement plus, c'est que cet album-ci n'est peut-être pas Definitely Maybe, mais ce n'est pas Standing on the Shoulder of Giants non plus.


Qui dit album solo dit, souvent, histoire intime et acoustique. Pas avec Noel. Everybody's on the Run, le premier morceau de l'album comprend un choeur de 100 personnes (Abbey Road, of course), des effets sonores un peu partout, et on retrouvera des cordes, des cuivres, du piano ou des percussions un peu partout sur l'album. Ce qui n'est pas spécialement étonnant de la part de l'auteur de Be Here Now, mais qui détonne largement de l'approche nettement plus rock 'n roll de Beady Eye. On reste donc en terrain très familier, voire même un peu trop. On ne se retrouve jamais surpris, les petites touches de "nouveaute", comme l'ambiance du single The Death of You and Me sont quand même très légères.


On retiendra trois choses de l'album. D'abord, Noel restera toujours un extraordinaire compositeur. Ses heures de gloires sont derrière lui, c'est évident : entre 1994 et 1996, il était absolument incapable d'écrire une mauvaise chanson. On l'avait écrit à l'époque, mais c'est d'autant plus vrai maintenant, la compile de faces B The Masterplan explose 90% des best of de fin de carrière qu'on retrouve aujourd'hui. Même si son talent s'est un peu dilué ses dernières années, il arrive toutefois à nous sortir des perles, comme les derniers excellents morceaux d'Oasis The Importance of Being Idle ou Falling Down. Ici, bonne surprise, on en retrouve quelques uns, des classiques à la Noel. Le single Death of You and Me déjà cité, mais aussi le remuant AKA... What a Life et surtout, surtout, If I Had a Gun. Il a beau avoir une progression d'accords directement tirée de Wonderwall, il reste facilement un des meilleurs morceaux écrits par Noel ces dix dernières années ; la première arrivée du refrain est absolument somptueuse.  Malheureusement, seule une petite moitié des morceaux d'un album pourtant court (dix pistes) sont vraiment mémorables. Pas si mal, mais peut mieux faire.


Ensuite, les morceaux connus depuis l'époque Oasis et repris ici ne comptent pas spécialement parmi les meilleurs. (I Wanna Live in a Dream in My) Record Machine est aussi pénible que le titre, et le fameux Stop the Clocks (tellement fameux que le premier best of d'Oasis lui emprunte le nom) n'est pas bien terrible non plus, même s'il se termine par une note psyché qui est probablement là pour préparer le terrain du prochain album, une collaboration avec Amorphous Androgynous.


Enfin, il manque Liam. Pas partout : Noel a écrit certains morceaux autour de sa propre voix, mais il est très facile de deviner lesquelles étaient prévues pour son frère. Si Liam avait chanté Dream On ou Everybody's on The Run, on aurait atteint une autre dimension. Mais non, pas de Liam, on doit donc se contenter de la voix tout à fait acceptable de Noel, mais qui n'est pas (toujours) celle qui était prévue pour ces morceaux.


Conséquences évidentes et somme toute assez prévisibles, Noel Gallagher's High Flying Birds n'est pas l'album de l'année mais n'est pas non plus le nouveau Coldplay. Il n'est quand même probablement plus intéressant et mieux écrit que le Beady Eye, mais comme point de comparaison, on peut trouver mieux, et plus ambitieux : Noel Gallagher devrait pouvoir faire mieux, et va peut-être le faire avec le second album. En attendant l'évidente réunion d'Oasis, en 2015 ou avant.


Spotify : Noel Gallagher's High Flying Birds

dimanche 16 octobre 2011

Playlist Spotify : 2011, troisième partie

Heureusement, la qualité des sorties de cette année est inversément proportionnelle avec le nombre de chroniques publiées. J'en profite pour sortir la playlist Spotify juillet-août-septembre, avec dix morceaux extraits d'autant d'albums que j'aimerais chroniquer (avec une bonne trentaine d'autres).


On commence avec un extrait live de la bande originale du film sur Pearl Jam, PJ20, et puis on a, pêle-mêle, Blink-182, Art Brut (ces paroles!), Wild Flag, Girls, Stephen Malkmus, EMA, Dum Dum Girls, Incubus et †††.


Comme d'habitude, la playlist est disponible sur Spotify, service de streaming légal toujours pas disponible officiellement en Belgique, mais bien en France et dans six autres pays d'Europe. Je vous tiendrai au courant de l'éventuelle disponibilité du service en Belgique (ainsi que celle de son concurrent Simfy), en attendant, il est possible d'utiliser un proxy ou un VPN comme l'excellent TunnelBear.


Pour suivre les playlists Music Box, passées, présentes et futures, cliquez le logo Spotify dans la colonne de droite :)


(NB : je voulais inclure aussi un extrait du Red Hot et de Rival Schools, mais pas dispo sur Spotify. Et j'ai préféré éviter Limp Bizkit, de rien ;-) )


Playlist Spotify : 2011, troisième partie


samedi 8 octobre 2011

Pearl Jam Twenty – Le film


Plus tôt dans l'année, les Foo Fighters ont sorti un film, Back and Forth, qui accompagnait la sortié de l'album Wasting Light. Présenté de manière strictement chronologique, le film racontait simplement l'évolution du groupe, de l'époque où Dave Grohl enregistrait seul ses chansons dans l'ombre de Kurt Cobain jusqu'à leur statut actuel de stars mondiales. Mais le film ne cachait rien : l'histoire des Foo est entachée de changements de personnel, souvent de manière brutale ; de même, le batteur Taylor Hawkins fut en proie à de sérieux problèmes de drogue, qui l'ont poussé à l'overdose. Back and Forth en parle systématiquement, et n'hésite pas à faire intervenir chaque personne concernée (y compris les anciens membres) et à faire passer Dave Grohl, pourtant officiellement The Nicest Guy in Rock, pour un control freak parfois détestable. Bien que le film se terminait dans la joie et la bonne humeur, avec l'enregistrement de Wasting Light dans la piscine familiale des Grohl (ou presque), le film (et le groupe) n'a définitivement pas choisi la voie évidente de l'hagiographie.

Il serait probablement excessif de parler de Pearl Jam Twenty comme une hagiographie. Mais force est de constater, après deux heures d'un film très soigneusement monté, aux images d'archives souvent hallucinantes, que le réalisateur Cameron Crowe n'a jamais cherché à trop bousculer le groupe ou les téléspectateurs. Pearl Jam Twenty est un documentaire, certes très bon, mais dont le degré critique est proche du zéro absolu.

Pearl Jam Twenty était très attendu. Mis en boîte par un réalisateur phare d'Hollywood qui a connu, sur place, la naissance de Pearl Jam, il devait raconter l'histoire d'un groupe qui a tout connu. Des débuts déjà marqués par le malheur, un succès interplanétaire très rapide et mal vécu par certains membres du groupe, des tragédies individuelles et collectives ainsi qu'une seconde décennie nettement plus introspective, jusqu'à une certaine résurgence commerciale. Tout ceci se trouve dans le film. Une bonne partie du début est consacré à Pearl Jam avant Pearl Jam, à savoir quand Stone Gossard (guitare) et Jeff Ament (basse) étaient membres d'un groupe de glam rock alternatif mené par le flamboyant Andy Wood et appelé Mother Love Bone. Après l'overdose fatale à Wood Gossard et Ament (depuis rejoints par un autre guitariste nommé Mike McCready et aidés par le batteur de Soundgarden Matt Cameron) envoient une cassette instrumentale de trois titres à un chanteur/surfeur de San Diego via Chicago, et le reste est Histoire.

Et l'Histoire, on la voit se dérouler sous nos yeux, dans un montage rapide mais pas hystérique. Beaucoup d'images inédites et légendaires : le deuxième concert de Pearl Jam (alors appelé Mookie Blaylock) avec la seconde prestation publique d'Alive (596 suivront à ce jour). Les fans connaissaient l'existence d'un concert acoustique à Zürich, en 1992 où, selon le groupe, la scène était plus petite qu'une estrade de batterie : le film prouve que cette affirmation est correcte. On voit aussi un jeune Vedder sérieusement bourré insulter MTV dans une salle plein d'exécutifs artistiques lors de la présentation du film (de Cameron Crowe) Singles, ainsi qu'une compilation des sauts de Vedder dans le public, qui restent absolument ahurissants. Mais l'image d'archive la plus extraordinaire provient de la collection personnelle de l'ex-guitariste de Hole Eric Erlandson, qui ne l'avait jamais rendue publique auparavant.
Il faut savoir qu'à l'époque, MTV diffusait de la musique, et la presse musicale avait un réel pouvoir. Et donc, on s'amusait à créer une guerre infondée entre Nirvana (les punks, les vrais) et Pearl Jam (les vendus influencés par Van Halen). Cobain et Vedder étaient donc censés se détester, même s'ils ne se connaissaient pas vraiment (et s'appréciaient plutôt pas mal). Un jour, lors des MTV Video Music Awards 1992, Eric Clapton joue Tears in Heaven, et en dessous de la scène, Kurt Cobain et Eddie Vedder dansent, dans les bras l'un de l'autre. L'histoire était connue, mais on ne l'avait jamais vue. C'est chose faite, et c'est aussi le seul document connu à ce jour où les deux porte-drapeaux du (désolé) grunge se retrouvent ensemble.

Rien que pour cela, PJ20 vaut tout l'or du monde (ou en tout cas les 14€ du ticket de cinéma et les 60 dollars de l'édition spéciale dvd/blu-ray) pour les fans du groupe, ou n'importe qui un tant soit peu intéressé par l'histoire du mouvement. Malheureusement, on ne voit que peu d'interactions avec d'autres musiciens, probablement par maque de temps (le film aurait facilement pu durer six heures, on annonce d'ailleurs quatre heures de bonus sur le DVD). A part Chris Cornell, qui intervient souvent lors de la première partie, on aperçoit en vitesse Alice in Chains, mais c'est plus ou moins tout. C'est d'ailleurs une caractéristique du film, la vitesse à laquelle tout est décrit. A peine finie la longue introduction au groupe, tout défile, à la vitesse du narrateur de la chanson MFC, extraite de Yield. Le bipolaire Vs, l'ambitieux Vitalogy se partagent quelques minutes de temps d'écran, mais beaucoup plus que l'expérimental No Code, album adoré des fans mais définitivement mal aimé du groupe. Et pendant ce temps, on se pose une question dont on n'aura jamais vraiment la réponse : mais que se passe-t-il dans la tête du groupe? Qui est Pearl Jam?

On connaît les démons du groupe, les problèmes qui ont entaché leur première décennie. La personnalité parfois écrasante d'Eddie Vedder, leur obsession criante pour le respect de la vie privée (amateurs de détails croustillants, passez votre chemin, et le - superbe - livre-compagnon ne vous dira rien de plus), les addictions de McCready, pour ne citer que quelques exemples. On en parle, un peu, en passant, mais sans jamais s'y attarder, comme Back and Forth pouvait le faire. Un exemple assez parlant : on voit Pearl Jam jouer Do the Evolution, live en studio, en 1998. McCready est en très mauvais état. Il est bouffi, a pris dix ans dans la tronche et est encore plus mal sapé que Cobain au Unplugged. Quelques secondes après, McCready version 2010, en pleine forme (il fait des marathons, maintenant, figurez-vous), parle de "sa mauvaise période", en passant, alors que sa fille, qui ne devait pas avoir beaucoup plus d'un an, joue devant lui. Que les choses soient claires, loin de moi l'envie de voir McCready en pleine crise de dépendance alcoolique, mais je ne peux m'empêcher de penser que Crowe n'a pas voulu aller au fond des choses, peut-être pour ne pas choquer un groupe composé avant tous de ses amis.
Mais le point le plus étonnant concerne sans doute les batteurs. McCready compare Pearl Jam à Spinal Tap, et n'a pas tort : avant même que le premier album ne sorte, Pearl Jam avait déjà utilisé quatre batteurs, et en utilisera encore deux par la suite, même si le premier, Matt Cameron, se retrouve être le dernier. Jack Irons est parti pour raisons de santé, on le sait, mais l'histoire du premier batteur, Dave Abbruzzese, est nettement plus confuse. Il aurait été viré parce qu'il n'avait pas la même vision de la célébrité que le reste du groupe (autrement dit, alors que Vedder voulait se retrouver le plus loin possible des médias, Abbruzzese embrassait un mode de vie de rockstar). On dit même que Vedder l'a viré parce "qu'il était plus beau que lui". La vérité, cela semble clair, ne sera sans doute jamais connue : Crowe ne lui a (probablement) pas donné la parole.

Malgré ces points d'ombre, Pearl Jam Twenty reste un documentaire passionnant, également lorsqu'il évoque la seconde décennie du groupe, au succès commercial très mitigé. Les albums BinauralRiot Act et Pearl Jam sont rapidement passés en revue, et on pourra être très surpris que pas un seul mot n'est dédié à ce qui reste, très étrangement, le morceau de Pearl Jam qui aura eu le plus grand succès commercial, Last Kiss. De toute façon, comme évoqué ci-dessus, Crowe aurait eu six heures de film et cela aurait quand même été trop court, et on pourra gloser pendant des heures sur les bienfaits et méfaits de l'édition du film : était-ce, par exemple, utile de montrer une longue audition de Gossard et Ament devant le sénat US lors de l'affaire Ticketmaster. La scène est souvent drôle (en fait, chaque scène avec Stone est drôle, Stone devrait avoir sa propre sitcom, si possible chez lui), mais elle a sans doute privé le film d'autres images émouvantes.

Ecrire une chronique sur un tel film est un exercice relativement futile, surtout quand l'auteur connaît beaucoup plus de choses qu'il devrait sur le monde de Pearl Jam. Il est très probable qu'un spectateur qui a perdu moins de temps sur MTV, à lire des magazines d'époque, ou à traîner dans des magasins de disques douteux à dépenser l'équivalent de 50€ pour un bootleg au son tout aussi douteux ne se posera pas le même genre de questions. Et si Crowe avait effectivement développé une partie un peu plus personnelle de la vie du groupe, d'autres passages en auraient nécessairement souffert. Je pense que les heures passées en salle d'édition ont du être particulièrement cruelles, et j'espère que le dvd/blu-ray pourra combler certains trous (mais pas ceux de la vie privée, on n'en saura absolument jamais rien).Oh, et tant que j'y suis : la musique, elle est vraiment, vraiment bien.

NB : après avoir écrit la chronique, j'ai appris qu'une édition spéciale du film, qui sortira le 25 octobre en dvd/blu-ray (exclusivement via pearljam.com) comprendra quatre heures de bonus, un cut spécial ne reprenant que les performances musicales du film ainsi qu'un documentaire inédit sur la principale force de Pearl Jam, son public.

NB2 : Pearl Jam Twenty, c'est aussi un livre passionnant, mais au même ton relativement détaché que le film. On y retrouve toutefois des images somptueuses ainsi que des essais intéressants sur chaque album du groupe. Il est d'ores et déjà disponible en version originale, et sera disponible fin octobre en version française aux éditions Autour du Livre.

NB3 : Pearl Jam Twenty, c'est aussi une bande originale passionnante, que je chroniquerai bientôt...

jeudi 22 septembre 2011

Pearl Jam Twenty - Le film

Plus tôt dans l'année, les Foo Fighters ont sorti un film, Back and Forth, qui accompagnait la sortié de l'album Wasting Light. Présenté de manière strictement chronologique, le film racontait simplement l'évolution du groupe, de l'époque où Dave Grohl enregistrait seul ses chansons dans l'ombre de Kurt Cobain jusqu'à leur statut actuel de stars mondiales. Mais le film ne cachait rien : l'histoire des Foo est entachée de changements de personnel, souvent de manière brutale ; de même, le batteur Taylor Hawkins fut en proie à de sérieux problèmes de drogue, qui l'ont poussé à l'overdose. Back and Forth en parle systématiquement, et n'hésite pas à faire intervenir chaque personne concernée (y compris les anciens membres) et à faire passer Dave Grohl, pourtant officiellement The Nicest Guy in Rock, pour un control freak parfois détestable. Bien que le film se terminait dans la joie et la bonne humeur, avec l'enregistrement de Wasting Light dans la piscine familiale des Grohl (ou presque), le film (et le groupe) n'a définitivement pas choisi la voie évidente de l'hagiographie.


Il serait probablement excessif de parler de Pearl Jam Twenty comme une hagiographie. Mais force est de constater, après deux heures d'un film très soigneusement monté, aux images d'archives souvent hallucinantes, que le réalisateur Cameron Crowe n'a jamais cherché à trop bousculer le groupe ou les téléspectateurs. Pearl Jam Twenty est un documentaire, certes très bon, mais dont le degré critique est proche du zéro absolu.


Pearl Jam Twenty était très attendu. Mis en boîte par un réalisateur phare d'Hollywood qui a connu, sur place, la naissance de Pearl Jam, il devait raconter l'histoire d'un groupe qui a tout connu. Des débuts déjà marqués par le malheur, un succès interplanétaire très rapide et mal vécu par certains membres du groupe, des tragédies individuelles et collectives ainsi qu'une seconde décennie nettement plus introspective, jusqu'à une certaine résurgence commerciale. Tout ceci se trouve dans le film. Une bonne partie du début est consacré à Pearl Jam avant Pearl Jam, à savoir quand Stone Gossard (guitare) et Jeff Ament (basse) étaient membres d'un groupe de glam rock alternatif mené par le flamboyant Andy Wood et appelé Mother Love Bone. Après l'overdose fatale à Wood Gossard et Ament (depuis rejoints par un autre guitariste nommé Mike McCready et aidés par le batteur de Soundgarden Matt Cameron) envoient une cassette instrumentale de trois titres à un chanteur/surfeur de San Diego via Chicago, et le reste est Histoire.


Et l'Histoire, on la voit se dérouler sous nos yeux, dans un montage rapide mais pas hystérique. Beaucoup d'images inédites et légendaires : le deuxième concert de Pearl Jam (alors appelé Mookie Blaylock) avec la seconde prestation publique d'Alive (596 suivront à ce jour). Les fans connaissaient l'existence d'un concert acoustique à Zürich, en 1992 où, selon le groupe, la scène était plus petite qu'une estrade de batterie : le film prouve que cette affirmation est correcte. On voit aussi un jeune Vedder sérieusement bourré insulter MTV dans une salle plein d'exécutifs artistiques lors de la présentation du film (de Cameron Crowe) Singles, ainsi qu'une compilation des sauts de Vedder dans le public, qui restent absolument ahurissants. Mais l'image d'archive la plus extraordinaire provient de la collection personnelle de l'ex-guitariste de Hole Eric Erlandson, qui ne l'avait jamais rendue publique auparavant.


Il faut savoir qu'à l'époque, MTV diffusait de la musique, et la presse musicale avait un réel pouvoir. Et donc, on s'amusait à créer une guerre infondée entre Nirvana (les punks, les vrais) et Pearl Jam (les vendus influencés par Van Halen). Cobain et Vedder étaient donc censés se détester, même s'ils ne se connaissaient pas vraiment (et s'appréciaient plutôt pas mal). Un jour, lors des MTV Video Music Awards 1992, Eric Clapton joue Tears in Heaven, et en dessous de la scène, Kurt Cobain et Eddie Vedder dansent, dans les bras l'un de l'autre. L'histoire était connue, mais on ne l'avait jamais vue. C'est chose faite, et c'est aussi le seul document connu à ce jour où les deux porte-drapeaux du (désolé) grunge se retrouvent ensemble.


Rien que pour cela, PJ20 vaut tout l'or du monde (ou en tout cas les 14€ du ticket de cinéma et les 60 dollars de l'édition spéciale dvd/blu-ray) pour les fans du groupe, ou n'importe qui un tant soit peu intéressé par l'histoire du mouvement. Malheureusement, on ne voit que peu d'interactions avec d'autres musiciens, probablement par maque de temps (le film aurait facilement pu durer six heures, on annonce d'ailleurs quatre heures de bonus sur le DVD). A part Chris Cornell, qui intervient souvent lors de la première partie, on aperçoit en vitesse Alice in Chains, mais c'est plus ou moins tout. C'est d'ailleurs une caractéristique du film, la vitesse à laquelle tout est décrit. A peine finie la longue introduction au groupe, tout défile, à la vitesse du narrateur de la chanson MFC, extraite de Yield. Le bipolaire Vs, l'ambitieux Vitalogy se partagent quelques minutes de temps d'écran, mais beaucoup plus que l'expérimental No Code, album adoré des fans mais définitivement mal aimé du groupe. Et pendant ce temps, on se pose une question dont on n'aura jamais vraiment la réponse : mais que se passe-t-il dans la tête du groupe? Qui est Pearl Jam?


On connaît les démons du groupe, les problèmes qui ont entaché leur première décennie. La personnalité parfois écrasante d'Eddie Vedder, leur obsession criante pour le respect de la vie privée (amateurs de détails croustillants, passez votre chemin, et le - superbe - livre-compagnon ne vous dira rien de plus), les addictions de McCready, pour ne citer que quelques exemples. On en parle, un peu, en passant, mais sans jamais s'y attarder, comme Back and Forth pouvait le faire. Un exemple assez parlant : on voit Pearl Jam jouer Do the Evolution, live en studio, en 1998. McCready est en très mauvais état. Il est bouffi, a pris dix ans dans la tronche et est encore plus mal sapé que Cobain au Unplugged. Quelques secondes après, McCready version 2010, en pleine forme (il fait des marathons, maintenant, figurez-vous), parle de "sa mauvaise période", en passant, alors que sa fille, qui ne devait pas avoir beaucoup plus d'un an, joue devant lui. Que les choses soient claires, loin de moi l'envie de voir McCready en pleine crise de dépendance alcoolique, mais je ne peux m'empêcher de penser que Crowe n'a pas voulu aller au fond des choses, peut-être pour ne pas choquer un groupe composé avant tous de ses amis.


Mais le point le plus étonnant concerne sans doute les batteurs. McCready compare Pearl Jam à Spinal Tap, et n'a pas tort : avant même que le premier album ne sorte, Pearl Jam avait déjà utilisé quatre batteurs, et en utilisera encore deux par la suite, même si le premier, Matt Cameron, se retrouve être le dernier. Jack Irons est parti pour raisons de santé, on le sait, mais l'histoire du premier batteur, Dave Abbruzzese, est nettement plus confuse. Il aurait été viré parce qu'il n'avait pas la même vision de la célébrité que le reste du groupe (autrement dit, alors que Vedder voulait se retrouver le plus loin possible des médias, Abbruzzese embrassait un mode de vie de rockstar). On dit même que Vedder l'a viré parce "qu'il était plus beau que lui". La vérité, cela semble clair, ne sera sans doute jamais connue : Crowe ne lui a (probablement) pas donné la parole.


Malgré ces points d'ombre, Pearl Jam Twenty reste un documentaire passionnant, également lorsqu'il évoque la seconde décennie du groupe, au succès commercial très mitigé. Les albums BinauralRiot Act et Pearl Jam sont rapidement passés en revue, et on pourra être très surpris que pas un seul mot n'est dédié à ce qui reste, très étrangement, le morceau de Pearl Jam qui aura eu le plus grand succès commercial, Last Kiss. De toute façon, comme évoqué ci-dessus, Crowe aurait eu six heures de film et cela aurait quand même été trop court, et on pourra gloser pendant des heures sur les bienfaits et méfaits de l'édition du film : était-ce, par exemple, utile de montrer une longue audition de Gossard et Ament devant le sénat US lors de l'affaire Ticketmaster. La scène est souvent drôle (en fait, chaque scène avec Stone est drôle, Stone devrait avoir sa propre sitcom, si possible chez lui), mais elle a sans doute privé le film d'autres images émouvantes.


Ecrire une chronique sur un tel film est un exercice relativement futile, surtout quand l'auteur connaît beaucoup plus de choses qu'il devrait sur le monde de Pearl Jam. Il est très probable qu'un spectateur qui a perdu moins de temps sur MTV, à lire des magazines d'époque, ou à traîner dans des magasins de disques douteux à dépenser l'équivalent de 50€ pour un bootleg au son tout aussi douteux ne se posera pas le même genre de questions. Et si Crowe avait effectivement développé une partie un peu plus personnelle de la vie du groupe, d'autres passages en auraient nécessairement souffert. Je pense que les heures passées en salle d'édition ont du être particulièrement cruelles, et j'espère que le dvd/blu-ray pourra combler certains trous (mais pas ceux de la vie privée, on n'en saura absolument jamais rien).Oh, et tant que j'y suis : la musique, elle est vraiment, vraiment bien.


NB : après avoir écrit la chronique, j'ai appris qu'une édition spéciale du film, qui sortira le 25 octobre en dvd/blu-ray (exclusivement via pearljam.com) comprendra quatre heures de bonus, un cut spécial ne reprenant que les performances musicales du film ainsi qu'un documentaire inédit sur la principale force de Pearl Jam, son public.


NB2 : Pearl Jam Twenty, c'est aussi un livre passionnant, mais au même ton relativement détaché que le film. On y retrouve toutefois des images somptueuses ainsi que des essais intéressants sur chaque album du groupe. Il est d'ores et déjà disponible en version originale, et sera disponible fin octobre en version française aux éditions Autour du Livre.


NB3 : Pearl Jam Twenty, c'est aussi une bande originale passionnante, que je chroniquerai bientôt...

mardi 20 septembre 2011

How much difference does it make?

Trois mois. Trois mois depuis le dernier article publié ici. De mémoire, je pense que c'est un record depuis la création de Music Box, voici tout juste huit ans.


Depuis maintenant quelques années, mon rythme de parution n'est plus ce qu'il était, et j'ai connu quelques périodes creuses, dira-t-on. Mais jamais une aussi longue. Oh, je pourrais trouver pas mal de raisons à mon silence (entre découragements, déceptions, décés et désintérêts, il y aurait de quoi), mais je préfère parler de ce qui n'en est pas une, de raison : je n'ai certainement pas plus rien à dire. Juste maintenant, en écrivant ces quelques lignes (avec le nouveau Kasabian, qui m'emmerde déjà après deux morceaux), j'ai une feuille de papier, sur mon bureau, avec facilement une trentaine d'albums sur lesquels j'ai envie d'écrire. Donc, plutôt que de perdre mon temps à me dire que je ne sais plus écrire, je vais faire exactement le contraire, et recommencer à écrire. Parce que finalement, je l'ai toujours fait, et je ne vois pas pourquoi je ne le ferais plus.


Bizarrement, même sans écrire, j'ai toujours quelques visiteurs en ces pages, et les quelques commentaires positifs glanés ces derniers jours  (ainsi que cet article) m'ont donné envie de recommencer. Idéalement, j'aimerais pouvoir couvrir toute la feuille de papier en question, mais on verra si c'est possible. En attendant, je vais recommencer avec quelque chose d'un peu spécial.


Vous connaissez peut-être mon appréciation pour Pearl Jam. Si ce n'est pas le cas, regardez la liste de tags à droite, et cherchez le nom de groupe à la plus grande police. Voilà. Pearl Jam, donc, fête ses vingt ans cette année, et fête l’évènement par un trio multimédia de sorties estampillées Pearl Jam Twenty (ou PJ20). Je vous parlerai donc ces prochains jours du film (que je vois ce soir), de sa bande originale (déjà écoutée) et du livre (presque fini). Et après cela, je reprendrai mes chroniques de "musique rock contemporaine", entre autres choses, j'espère.


Merci d'être passé ici, et j'espère que vous y resterez un peu, et repasserez aussi souvent que possible.


Oh, et pour finir, deux petites choses :

- Je ne parlerai pas du Kasabian.

- La feuille de papier? La voilà.

samedi 25 juin 2011

Playlist Spotify : 2011, deuxième partie

Ce n'est pas parce que je n'écris presque plus que je n'écoute plus rien, heureusement... Le deuxième quart de l'année se termine dans quelques jours, et voici donc un playlist Spotify pour récapituler ces trois derniers mois. Théoriquement, j'aurais du vous parler de tous ces albums et j'espère pouvoir en chroniquer le plus possible, mais...

Quatorze morceaux et une petite heure avec Foo Fighters, The Kills, Beastie Boys, Miles Kane, Arctic Monkeys, WU LYF, Raveonettes, Eddie Vedder, J Mascis, Thurston Moore, Frank Turner, Ben Harper, Fucked Up et Battles.

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lundi 13 juin 2011

Eddie Vedder - Ukulele Songs

Eddie Vedder. Vingt ans de carrière avec Pearl Jam. L'ukulele. Cent trente ans de carrière avec des gros hawaiiens et autres attrape-touristes. À première vue, le duo est aussi incongru que celui d'Eminem avec Elton John, le jour où l'ex-rappeur le plus connu du monde a voulu prouver qu'il n'était pas homophobe. Pourtant, leur histoire commune remonte à plus de dix ans. Lors des sessions d'enregistrement de ce qui deviendra leur dernier classique (Binaural, évidemment), Eddie Vedder était en retard en ce qui concerne les textes. Angoisse de la page blanche. Pour tenter de retrouver l'inspiration, il s'imposa un sacrifice : tant que les paroles de l'album ne sont pas terminées, il ne touchera plus à la guitare.


Mais au détour d'un night shop à Hawaii (où, forcément, il allait surfer), il tomba sur ce semblant de guitare à quatre cordes et au manche court. Et comme c'est Eddie Vedder, il rentra dans la boutique et ressortit avec l'instrument (et deux bacs de bière, quand même). Vedder s'est alors probablement dit 'aaaahhhh fuck it, that's not, huh, a guitar', et comme son héros Pete Townshend avait écrit un morceau à l'uke (Blue Red and Grey), Eddie emprunta les accords, composa Soon Forget et voilà, page blanche terminée, il termina ce chef d'oeuvre (j'insiste) qu'est Binaural.


Depuis, l'ukulele est sorti quelques fois, pour jouer Soon Forget lors des concerts de Pearl Jam, ou pour les prestations solos de Vedder, notamment deux mini-concerts de 2002 où il joua quelques morceaux inédits. Du moins, inédits jusque maintenant, car Ukulele Songs, qui voit le jour grâce au surfer Kelly Slater qui aurait tanné Vedder pour qu'il le sorte, est une collection de quatorze chansons enregistrées de 2002 à 2011, et qui ont comme point commun de d'avoir comme instrumentation qu'un seul ukulele. Ce qui semble un peu limité quand même. C'est mignon, un ukulele, ça fait vacances, colliers de fleurs et lotion au monoï, mais de là à en faire un album entier, il y a un pas, pourtant aisément franchi par Vedder qui a passé l'âge de se préoccuper de ce genre de choses. Surtout que Vedder à un double avantage par rapport aux orthodoxes de la quatre-cordes et du pagne : d'abord, il en joue comme d'une guitare, et arrive à en sortir des sons pas typiques du tout, et en plus, sa putain de voix, quoi. L'ukulele apportant une instrumentation très légère, il fallait une voix profonde en contre-poids, et Vedder la délivre sans efforts. De plus, comme les morceaux ont été écrits sur une longue période de temps, on retrouve des compos sombres et intenses, plus proches de Riot Act que de Backspacer.
En parlant de Riot ActUkulele Songs s'ouvre avec Can't Keep, qui débutait déjà cet album. Directement, on comprend que Vedder approche l'instrument avec une mentalité de punkrocker : on ne jouera pas le morceau pour accueillir des allemands friqués qui descendent d'un bateau. Toute l'essence du morceau, et de là, l'état d'esprit de Vedder circa 2002 (en résumé : il n'était pas bien) est concentré dans cette petite guitare étrange qu'on va se mettre à apprécier pendant une bonne demi-heure. Sinon, quand je disais qu'il n'était pas bien, il n'était pas bien. Finies les niaiseries infâmes de Just Breathe, ici, on retrouve un Vedder post-11 septembre et pré-mariage-avec-top-modèle-et-deux-jolizenfants. Sleeping by Myself : "I should have known there was someone else". Broken Heart : "I'm alright, it's just a broken heart". Goodbye : tout le morceau. Et ainsi de suite.


Lourd de sens, mais délivré avec exactement la bonne dose d'émotion. Pas trop de pathos, mais aucune légèreté non plus : Vedder, et on n'a pas eu l'occasion de dire ça depuis quelques années, est pile dans la nuance. Et la nuance en question fait contrebalancer les chansons d'amours déçues par d'autres au point de vue plus optimiste, comme Without You (cette intro!), Light Today (bien qu'il soit sans doute le morceau le moins consistant de l'album) ou le joli You're True ("nothing here ever comes my way", mais elle est arrivée et depuis ça va mieux). Bon, évidemment, Vedder s'est senti obligé de parler d'océan et de lune dans chaque morceau, mais il fait ça depuis vingt ans, et personne ne s'en plaint. Deux autres highlights de l'album proviennent de ces fameuses sessions de 2002. Satellite, écrite selon le point de vue de l'épouse d'un des West Memphis Three apporte des choeurs et un peu de relief, alors que Longing to Belong enfreint la règle de départ en ajoutant un discret violoncelle. Mais dans un cas comme dans l'autre, l'émotion est au rendez-vous, ni trop, ni trop peu, et ce n'était pas facile ("I'm falling faster than I ever fell before").


Voilà pour les originaux d'Eddie. Parce que ce n'est pas tout : en bon américain qui connaît ses classiques, Vedder a posé son baryton et son uke sur quelques standards du music hall US. Malheureusement, le résultat semble plus plat, et aussi plus artificiel, même si Vedder n'est pas à pointer du doigt : ses morceaux à lui collent simplement mieux à l'ambiance de l'album. Dream a Little Dream, qui conclut l'album, est chanté avec tant de sérieux qu'on pourrait croire à une parodie. Une fois n'est pas coutume, un de ces morceaux est sauvé par quelqu'un d'autre, à savoir Cat Power, qui duette bien joliment sur le craquant Tonight You Belong To Me. Et Glen Hansard fait de même sur le Sleepless Night des Everly Brothers, et pour réussir à tenir un duo avec la voix d'Eddie Vedder, il faut le faire, n'est-ce pas, Andrew Stockdale?


Ukulele Songs est tout sauf un album solo traditionnel, et absolument l'opposé du trip égocentrique. Vedder ne cherche pas à se faire aimer, ni à rendre sa musique trop accessible (Backspacer, anyone?). Il livre juste une collection de morceaux, certains oubliables, d'autres comptant parmi les meilleurs écrits par Vedder ces dix dernières années. A qui se destine l'album? Certainement à la masse de fans irréductibles de Pearl Jam qui aimeront avant d'avoir écouté. Probablement aussi à ceux qui n'aiment pas vraiment le rock, mais qui ont bien aimé les chansons du film de Sean Penn avec le type qui va mourir dans les bois. Mais étonnamment, il peut aussi être très apprécié par les déçus de la production récente de Pearl Jam. Qui redeviennent alors, une fois de plus, indécrottablement optimistes pour leur dixième album, qui devrait sortir l'année prochaine...



dimanche 29 mai 2011

The Strokes - Angles

Il aura fallu six ans et une certaine somme de conflits internes et d'egotrips en tout genre pour que les Strokes se décident enfin à sortir enfin leur quatrième album, soit plus de temps que pour leurs trois premiers réunis. Pourtant, l'attente n'était pas vraiment insoutenable : les membres du groupe avaient plus ou moins tous sortis leur album solo/projet parallèle et aucun n'aura déchaîné les passions, que ce soit le carré Nickel Eye au suranné Little Joy, en passant par l'assez mauvais essai de Julian Casablancas. Seul Albert Hammond Jr. s'en était bien tiré avec deux albums certes peu originaux mais solides. Donc, Angles arrive dans une relative indifférence, seuls semblent intriguer l'hideuse pochette et les anecdotes des interminables sessions d'enregistrement. Tout était donc réuni pour qu'Angles soit une petite surprise, un album du type "ah, ben on ne les attendait plus, ceux-là".


Angles commence bien. Machu Picchu (?) commence avec un rythme reggae (bizarrement, ça marche) avant que Casablancas n'invoque le bon côté des années 80 (il avait épuisé le mauvais sur Phrazes for the Young, j'imagine), tout en chantant, comme au bon vieux temps, dans un vieux téléphone en bakélite noir. Les guitares passent de ludiques à gentiment énervées, et nous rappellent comme l'interaction Hammond/Valensi est un des élements qui ont fait de Is This It un album qui a défini la décennie passée. Casablancas n'a pas spécialement appris à chanter, mais y met (enfin) tout son coeur, et s'énerve même un peu à la fin. Même quand il parle de Lady Gaga ("wearing a jacket made of meat"), on y croit. Surtout que le morceau suivant, Under Cover of Darkness, a beau être un Strokes-by-numbers, c'est le meilleur depuis Room on Fire. Everybody's singing the same song for ten years, mais il y avait encore une place pour les cinq de NY, finalement. Et ça fait du bien, tout comme Two Kinds of Happiness, où Casablancas semble toujours s'en foutre, et ne même pas essayer de faire des phrases complètes et compréhensibles. On connaît son obsession pour les trucs un peu kitsch des eighties (la dernière fois que je l'ai vu, il avait une mèche blonde et un pantalon moulant en cuir rouge, quand même), mais généralement, le groupe arrive à retourner cet aspect en leur faveur. Oui, You're So Right est assez synthétique, oui, Fab Moretti y a été (vraiment) remplacé par une boîte à rythmes, mais cela reste un excellent morceau même si assez étrange, avec ses effets vocaux et la guitare de Street Spirit (Fade Out) enregistrée dans une piscine. Games pourrait se retrouver sur la BO de Back to the Future, mais ailleurs, Taken for a Fool croise Elvis Costello avec Blondie : quand on vous parlait du bon côté des eighties. La fin de l'album continue dans la même veine hit and miss, mais quand ça marche, c'est l'excellent Gratisfaction, qui sonne comme Thin Lizzy (si) ou Life is Simple in the Moonlight, qui rappelle en quatre minutes que les Strokes ne sont pas (encore?) finis.


Angles est un album étrange. Après une si longue absence, leur retour est discret, pas vraiment satisfaisant mais loin d'être mauvais non plus, notamment si on tient en compte l'énorme élargissement de leurs influences et de leurs qualités de musiciens. L'album est inégal, parfois brillant, parfois juste oubliable. Malheureusement, vu la mauvaise ambiance qui entoure le groupe, il me semble probable qu'on ne retrouvera plus jamais la force créatrice qui fut la leur voici déjà une décennie. Espérons alors qu'ils auront la décence de jeter l'éponge plutôt que de continuer coûte que coûte. Ou alors, encore mieux : ils peuvent simplement me prouver que j'ai tort.


Spotify : The Strokes - Angles

dimanche 24 avril 2011

Foo Fighters - Wasting Light

Et le Grammy de meilleure promotion de l'année va aux... Foo Fighters! Parce que franchement, il fallait le faire. On commence, typiquement, avec Dave Grohl qui raconte que ce sera l'album le plus heavy de l'histoire du groupe, et on ne demande qu'à le croire, surtout qu'avec le retour de Pat Smear, les FF comptent dorénavant trois guitaristes. Ensuite, on apprend que l'album sera enregistré dans son garage, en analogique, par Butch Vig, et que Krist Novoselic et Bob Mould viendront donner un coup de main. Puis vient le moment des shows secrets, annoncés le jour même sur Twitter, où le groupe joue l'album (encore sans nom) intégralement, histoire de pousser (mais pas trop) aux fuites sur Youtube. Au même moment est diffusée une vidéo pour l'effectivement très heavy White Limo, qui voit le groupe en full mode déconne se faire conduire (en limousine blanche, forcément) par Lemmy. Enfin, ils leakent eux-même l'album sur leur page Soundcloud (il y est d'ailleurs toujours dispo), et on peut effectivement se rendre compte que oui, c'est l'album le plus heavy du groupe jusque maintenant. Et ce pouvoir du marketing leur offre un numéro un partout dans le monde, avec un album qui est donc écoutable légalement et gratuitement. L'incitant à l'achat? Rien de moins qu'un morceau de la bande magnétique originale sur lequel a été enregistré l'album.


L'album, donc, Wasting Light. Pas une guitare acoustique, disait le batteur de Tenacious D. Effectivement. Le premier morceau, Bridge Burning, est une démonstration de force. Une guitare, puis deux, puis trois, puis une attaque de batterie surpuissante, et Dave Grohl qui hurle pour la première fois du disque. Bam dans les dents. Oh, évidemment, ce sont les Foo Fighters, et le reste du morceau (et de l'album) restera mélodique, mais on a déjà l'impression que le quintet est totalement libéré. Des riffs dans tous les sens, des fills de batterie qui prouvent s'il le fallait encore que Taylor Hawkins n'est pas juste un batteur de figuration, et surtout la construction du morceau qui semble enchaîner pré-refrains, refrains, post-refrains, bref, Dave a mis le paquet.


La suite est du même acabit : même si presque chaque morceau offre ses moments de répit (ces passages typiquement FF où Grohl, le groupe, et le public reprennent leur respration avant que tout explose, encore), l'album file à très grande vitesse, puissant, rapide, mais toujours facile d'accès. Dave Grohl continue la tradition de rendre une musique relativement heavy accessible au plus grand nombre, comme son ancien chanteur l'avait fait il y a presque vingt ans. Mais dire que Wasting Light, c'est juste des morceaux heavy bourrés de riffs et de vieux solos serait une insulte au talent réel d'auteur de Grohl : Dear Rosemary, Arlandria, Walk ou encore le stupéfiant I Should Have Known comptent parmi les meilleurs morceaux composés par un type qui a quand même écrit Everlong. Et même si Dear Rosemary ressemble parfois un peu trop à Steady As She Goes des Raconteurs, ça reste un très grand morceau, vraiment.


Wasting Light n'est pas un album parfait. Dave Grohl est très généreux, et sa bonne volonté le force parfois à en faire un peu trop. Comme, justement, les trois refrains différents par morceau, une dynamique quiet/loud/very loud/encore plus loud ou un niveau de testostérone que le jeune Eddie Vedder n'aurait pas renié. Butch Vig a peut-être aussi surmixé sa voix, mais c'est un avis personnel. D'ailleurs, garage ou pas, Vig a quand même emballé le tout dans une production expansive qui fait nettement plus Wembley Stadium que CBGB.


L'album offre relativement peu de variété : outre les brûlots rock comme Bridge Burning ou le single Rope, on a aussi des compos un peu plus pop comme These Days, Miss the Misery (avec des whoohoo très Bon Jovi, il ne manque plus que l'effet à la Sambora déjà entendu sur Generator) ou Walk qui commencerait presque comme Kings of ColdMuse, des morceaux plus sombres (I Should Have Known) ou totalement débridés (White Limo, donc), le template reste identique (ah, cette guitare rythmique...). Mais quand les morceaux sont si bien écrits, quand les musiciens frôlent l'excellence, pourquoi changer?


Wasting Light est un album concept, en somme, et le concept était de réaliser le meilleur album de rock 'n roll possible en 2011. Probablement anachronique, certainement futile, mais absolument réussi, Wasting Light est non seulement le meilleur album d'un groupe pas assez pris au sérieux, mais aussi la place assurée de Dave Grohl au Panthéon des compositeurs contemporains. Surtout, Wasting Light est fun, agréable, et appréciable. Pas d'artiste torturé et incompris, pas de complexité à deux balles pour décrocher un BNM chez Pitchfork, pas de poses mystérieuses pour être rebloggé sur Tumblr. It's only rock 'n roll and you should like it.


Spotify : Wasting Light et Wasting Light deluxe edition (avec un remix de Rope par Deadmau5 et l'inédit Better Off). Et tant qu'on y est, ma playlist Foo Fighters.

Et si vous n'avez pas (encore?) Spotify, le groupe a le bon goût de nous laisser le stream Soundcloud jusqu'à nouvel ordre.