vendredi 29 novembre 2013

Novembre 2013

Les sorties, c'est plus ou moins fini pour 2013. On n'a maintenant presque plus que les ressorties et les compiles traditionnelles de Noël, et cela sera encore pire en décembre, qui sera quasi vierge de nouveautés. Ceci dit, quelques albums originaux vaguement importants sont quand même sortis en novembre, et on va en parler.

DétroitMon album du mois, c'est Détroit - Horizons. Aucune envie de polémiquer, d'excuser, d'expliquer, je n'en ai pas envie et je ne m'en sens pas capable. Ce que je peux dire, par contre, c'est qu'Horizons est un album d'une infinie tristesse, d'une terrible désolation. Mis à part quelques rares saillies électriques pouvant rappeler Noir Désir, l'ambiance créée par Bertrand Cantat et Pascal Humblet est étouffante, intense et implacable de beauté triste. On pourra interpréter les paroles comme on voudra, mais pour moi, certains passages me semblent sans équivoque quant à leurs références : si Cantat ne pouvait pas parler de l'"affaire" (voire des affaires), les censeurs n'ont pas vraiment écouté l'album (mais je n'ai rien compris à ces histoires de chiens ninja).

Quoi d'autre en novembre? Tant que je parle d'un truc en français, j'ajoute le nouveau Guerilla Poubelle, qui a eu la lourde tâche de succéder à Punk=Existentialisme. Amor Fati n'est pas aussi puissant, mais comme les miracles se produisent rarement deux fois, on s'en contentera amplement. La nouvelle sensation alt-pop Lorde, néo-zélandaise alignant bien malgré elle les reviews truffés de clichés vaguement sexistes ("fraîche", "pas vulgaire", etc etc). J'espère pour elle qu'elle ne deviendra pas la nouvelle Lana Del Rey, ce qui serait vraiment dommage (Pure Heroine). Connan Mockasin, le chouchou des amateurs d'alt-pop (encore) luxuriante mais chantée par un homme, ce qui est *évidemment* nettement moins vulgaire, forcément. Bien, mais je trouve quand même que ça manque de substance. Mais pas autant que Jake Bugg, qui bat le fer tant qu'il est chaud en sortant déjà son second album, Shangri-La. Mais vu que le fer en question rappelle une période de la musique british heureusement oubliée, on l'oubliera aussi, le Jake. Le fait que je ne supporte pas sa voix n'aide pas, je le reconnais. Ah, et pour finir le c-c-c-combo breaker, il est produit par Rick Rubin. On retiendra aussi Swearin' et Surfin Strange, superbe album du groupe de l'autre soeur Crutchfield, riyl : Waxahatchee. On reparlera des deux dans quelques semaines.

Vous vous rappelez de Lady Gaga? Il semble que son quart d'heure est déjà fini, Icare, le soleil, tout ça. D'autant plus dommage qu'Artpop est peut-être son meilleur album. Evidemment, il souffre de quelques fillers atroces, mais au moins la moitié de l'album est acceptable, ce qui est bien plus que le précédent (celui avec la pochette Judas Priest). Elle devrait se la jouer encore plus Bowie et fonder son Tin Machine, maintenant.

Et à part ça, compiles et ressorties, donc. The Next Day de Bowie avec des morceaux en plus et un remix de James Murphy, une compile extensive des excellents et très influents The Beta Band, un best of des nettement moins influents A Perfect Circle, une seconde compilation des passages des Beatles à la BBC (toujours aussi anecdotique, mais charmant) et c'est plus ou moins tout pour ce mois-ci. Ah oui, j'oubliais, un grand boxset très cher de Therapy? (The Gemil Box), avec leurs quatre premiers albums remasterisés, un livre, un dvd, une cassette et quatre disques remplis d'inédits. Je suis fauché, pensez à moi, merci.

J'ajoute quelques morceaux d'EP ou d'albums à venir dans la toute petite playlist Spotify, et la prochaine fois, je reviens avec mon top 100 des albums de l'année. Gros travail en perspective, parce que j'en ai quand même presque 200 sur ma liste même pas virtuelle. Who says rock is dead, etc etc.

jeudi 7 novembre 2013

Octobre 2013

2013 est maintenant presque terminé, en terme de sorties de nouveaux albums. Il ne reste plus que les éditions spéciales et compiles de Noël (Bowie, Beatles et quatre millions d'autres) et des artistes en perte de vitesse qui sortent après les autres histoire de minimiser la concurrence (Lady Gaga). Mais c'est peut-être en octobre qu'est sorti l'album de l'année, ou en tout cas celui dont parle le plus (avec Yeezus, allez). Et c'est sans problème mon album du mois.

ReflektorParce qu'il était très attendu, Reflektor, et annoncé par une campagne marketing roots et efficace. Arcade Fire est le plus gros groupe indé du monde, même s'il n'est pas stupide de dire qu'ils n'arriveront peut-être jamais à dépasser l'impact émotionnel de leur début, Funeral. Alors qu'il aurait été plus simple de se répéter, les montréalais ont engagé le leader de leur groupe préféré, James Murphy, pour produire un album radicalement différent. Reflektor est long (85 minutes, des morceaux dépassant allègrement les six), ambitieux (double album en deux parties thématiques) et terriblement varié, alliant du rock indé relativement classique à des influences haïtiennes (second pays du groupe) en passant par des références littéraires (Orphée et Eurydice) illustrant les thèmes chéris par le groupe comme la perte de l'innocence, l'enfance, l'évolution vers l'âge adulte, la mort. Il faudra sans doute des mois pour décrypter Reflektor, mais est-ce bien nécessaire?

Octobre a aussi vu la sortie du dixième album de Pearl Jam, qui succède au lamentable Backspacer. L'avantage de succéder à un album oubliable, c'est qu'il n'est pas bien difficile de faire mieux. Lightning Bolt est meilleur que Backspacer, mais il est peut-être aussi le meilleur album du groupe en dix ans. Malheureusement, il reste très frustrant : à côté de morceaux intéressants comme Infallible, Pendulum, le vitriolique My Father's Son ou le déjà classique Sirens, Pearl Jam (ou le producteur Brendan O'Brien, qui devrait subir le même sort que Jaime Lannister un de ces jours) a jugé bon d'inclure Sleeping By Myself, déjà anecdotique sur l'album solo d'Eddie Vedder (lui-même anecdotique, pour être honnête) et présent ici en version navrante ou Future Days, qui a au moins l'avantage en tant que dernier morceau de l'album d'être facilement oublié. Frustrant, donc, surtout que les fans connaissent l'existence d'excellents morceaux (Of the Earth, Cold Confession notamment) qui semblent avoir été oubliés par le groupe. Occasion à moitié loupée, donc.

On a eu très peur pour Lemmy, qui a connu pas mal de problèmes de santé cette année, mettant à mal l'évidence de son immortalité. 2012 était la première année paire depuis 1994 à ne pas voir d'album de Motörhead, mais la patience est récompensée : Aftershock est un très bon album (bien que le niveau du trio est ahurissant depuis des années), plus varié que ce que l'on pense (à tort!) du groupe. Si Aftershock venait (mais ce ne sera pas le cas) à être le dernier album de Lemmy, on a connu bien pire épitaphe.

Pour le reste, octobre est un melting pot de sorties diverses et variées. Après moultes tentatives (toutes foirées) d'accrocher un semblant de renouveau, Korn joue son avant-dernière carte et fait revenir le guitariste Head, parti rejoindre Jésus voici une dizaine d'années. Pour être tout à fait correct, Korn a déjà fait pire que The Paradigm Shift, mais il ne leur reste plus qu'une seule solution pour accrocher l'attention : se séparer et revenir cinq ans plus tard. Ce que n'a jamais eu besoin de faire un certain Paul McCartney, probable meilleur compositeur de l'histoire de la composition. New a été confié à quelques producteurs "modernes" (Ronson, Johns, Epworth et Giles Martin) qui réussissent à garder son inimitable son, le mettre à jour sans le ridiculiser. Une vraie bonne surprise.

Deux groupes cultes, plus ou moins gallois, et avec une attention particulière aux paroles pour suivre : Los Campesinos! et Future of the Left. On pourrait tellement comparer Los Campesinos! aux Smiths pour plein de raisons,  comme les paroles (évidemment) et leur audience fantastiquement fanatique. Mais ce serait complètement passer à côté de l'attrait de la musique du groupe, délicieusement mélancolique, recherchée, douloureuse, rassurante, glorieuse (No Blues). Quant à Future of the Left, maintenant qu'ils ont un album de plus que Mclusky, il faudrait peut-être arrêter d'en parler à chaque fois. Oops. Financé par Pledge Music, How to Stop Your Brain in an Accident est ce qu'on peut attendre de la bande à Andy Falkous, maintenant fermement un quatuor. Abrasif tant au niveau de la musique que des paroles, l'album se permet toutefois quelques excursions réussies vers une certaine idée de la musique pop (Falco chante!). Un EP 6 titres d'outtakes intéressantes, Human Death, sort en parallèle.

Sleigh Bells tente une seconde fois de nous faire croire que leur date d'expiration n'est pas dépassée depuis longtemps, mais on n'est pas dupe. Derek Miller lève un peu la main sur la production, légèrement moins bourrine qu'avant et nous dit qu'Alexis Krauss a beaucoup participé à l'écriture. Mais si l'on considère que l'album (Bitter Rivals) est constitué de morceaux de 3 minutes maximum qui deviennent emmerdants après 40 secondes, ce n'est pas suffisant, malgré les tentatives de sonner comme Beyoncé.

Plus intéressant, The Dismemberment Plan nous revient pour de bon, avec leur premier album en douze ans. Beaucoup de choses se sont produites depuis, notamment 4 tonnes de groupes influencés par Travis Morrison & co. Uncanney Valley arrive sans faire trop de bruit, et repart de la même manière. Agréable et divertissant, en espérant que c'était leur but. Cage the Elephant est annoncé comme "the next big thing" depuis quelques années, et il est possible que Melophobia soit l'album qui les fasse exploser (tout comme une tournée prochaine avec Muse). Mais je n'y connais rien à ces trucs, je trouve juste que leur son est sympa sans plus : à force d'emprunter un peu partout, on se retrouve avec peu d'identité. Poliça s'est bien détaché de l'étiquette Bon Iver (Justin Vernon vient dire bonjour sur un morceau, quand même) et sort un album d'indé-électro (Shulamith) bien réalisé mais peut-être un peu fatigant. Mais une fois de plus, qu'est-ce que j'en sais, j'ai bien aimé le dernier album d'Electric Six, Mustang, qui ressemble à un album d'Electric Six. Et j'ai bien aimé aussi Corsicana Lemonade, le nouvel album tout à fait recommandable de White Denim, qui tape un peu dans tous les sens, comme une sorte de version mathy de Soundgarden qui jouerait du classic rock.

Dans la catégorie EP, on notera avant tout Best Coast, qui revient brillamment à la fuzzpop du premier album avec la voix de Bethany qui a bien progressé depuis (Fade Away) mais aussi Albert Hammond Jr., dont AHJ ressemble plus au son Strokes que tout ce qu'ils ont sorti en dix ans. Toujours en EP, les comiques de Fall Out Boy se la jouent Black Flag sous la direction de Ryan Adams (Pax-Am Days), alors que le duo TheHELL (Atom Willard et Matt Skiba) fait nettement mieux avec le brut Southern Medicine. Parquet Courts confirment qu'ils sont bien la réincarnation de Pavement joué par les Beastie Boys (Tally All The Things You Broke), The Men continuent leur évolution de plus en plus loin du hardcore quasi instrumental de leurs débuts avec un EP qui porte très bien son titre (Campfire Songs) alors que Stone Temple Pilots récupèrent un chanteur fiable (Chester Bennington) mais n'arriveront jamais à sortir de la division 3 du rock indé dans laquelle ils végètent depuis toujours (High Rise).

Voilà pour octobre, il est probable que novembre et décembre soient balancés en même temps, juste avant le récapitulatif de 2013.

Playlist Spotify ci-dessous!

dimanche 6 octobre 2013

Septembre 2013

Comme chaque année, des tonnes de sorties en cette rentrée scolaire et musicale. On ne traîne donc pas.

Arctic Monkeys - AMMon album du mois, et probablement de l'année à moins qu'Arcade Fire désamorce le piège du double album, c'est Arctic Monkeys - AM. Je sais que je le fais à chaque fois, mais sincèrement, je le pense, et cette fois je ne suis pas le seul, compte tenu des reviews unanimement en faveur de leur cinquième album. Je ne sais pas si c'est leur meilleur, mais c'est en tout cas leur plus travaillé, leur plus précis et, avec Humbug, leur plus étonnant, mettant au point un son différent tout en étant toujours typiquement Monkeys, probablement la marque des grands.

Un son différent à chaque album, c'est aussi un trait quasi systématique des Manic Street Preachers. Rewind the Film ne comprend quasi pas de guitare électrique et semblait destiner à rejoindre Lifeblood sur le podium de leurs albums "mal compris", mais non : il est excellent, varié, très intelligent, quasi sans baisse de niveau et prouve qu'un "vieux" groupe peut encore étonner en innovant. Et ce n'est pas fini : le "post-punk" Futurology est censé sortir l'an prochain.

Je termine mon trio du mois avec Janelle Monáe, dont le second album The Electric Lady est une merveille d'inventivité, et, probablement, de génie. Elle passe d'un genre à l'autre avec une aisance remarquable, sans ennuyer ou se répéter une seconde. Incroyable.

Septembre a aussi vu le retour discographique semi-surprenant de Nine Inch Nails, qui s'est distingué cet été par son light show aussi spectaculaire que les sautes d'humeur de Trent Reznor. Hesitation Marks semblait être un retour aux sources pour NIN, c'est en fait un album différent des autres, une fois de plus. Sans doute l'album le plus synthétique de Reznor, il puise son inspiration un peu partout, dans les BO de films qu'il a récemment composé avec Atticus Ross, dans la synthpop des années 80 (l'invraisemblable Everything) ou la pop/RnB contemporaine (Satellite, All Time Low). La grande variété de l'album en empêche par définition sa cohérence : Hesitation Marks n'est pas un grand album de NIN, mais c'est un de mes préférés.

On avait laissé Kings of Leon en mauvaise posture, suite à un album simplement mauvais et quelques troubles personnels. Sans arriver au sommet des premiers albums, Mechanical Bull se défend très bien, et joue même parfois la carte de la relative variété, lorgnant du côté de Queens of the Stone Age (comme tout le monde) et de Sly and the Family Stone. Tout en usant et abusant du combo arpèges/pédales de délai, évidemment. Pete Doherty, quant à lui, est toujours en mauvaise posture, et c'est donc encore plus étonnant de remarquer que le troisième album de Babyshambles, Sequel to the Prequel, est bon et ordonné. Certes, Doherty n'est pas seul, mais c'est évidemment son esprit très libre qui plane au-dessus de douze morceaux passant du punk au dub en passant par deux ou trois compos qui auraient nettement plus marqué les esprits si l'autre guitariste était Carl Barât. Mais bon, ça aussi, c'est fini. Qu'importe, c'est sans doute leur meilleur album.

Chvrches, composé d'ex-Twilight Sad et Aereogramme ainsi que de l'excellente chanteuse Lauren Mayberry fait de l'électro accessible, jamais agressive, recherchée et intelligente. The Bones of What You Believe rappelle les meilleures heures de la new wave, passées sous un filtre indé. Toujours en Écosse, vous vous rappelez de Glasvegas? Il y a déjà six ans sortait leur premier album qui augurait d'un futur intéressant. Un second album en forme de suicide commercial plus tard, Glasvegas se retrouve sans label et auto-produit (maladroitement) un troisième album (Later... When the TV Turns to Static) qui est censé leur ressembler, jusqu'à l'accent à couper au couteau du chanteur James Allen. Il passera probablement inaperçu, mais il n'est pas dénué de qualités, même si la voix peut fatiguer bien vite. Encore dans la catégorie "vous vous souvenez de", MGMT. Un des plus gros suicides commerciaux de ces dernières années, Congratulations a totalement enterré l'immense succès d'Oracular Spectacular, six pieds sous terre. MGMT tente de trouver une place entre les deux : on ne peut pas/veut pas/sait pas écrire des trucs catchy comme avant, mais on veut quand même que Pitchfork nous aime bien. Ce qui marche plus ou moins, parfois.

On a beaucoup parlé de London Grammar, à qui la presse a déjà donné le Mercury Prize de l'année prochaine. Leur album If You Wait est une sorte de mix entre The XX et Daughter, sublimé par la voix enfumée de Hannah Reid et est juste assez discret pour être très bien accueilli. En parlant de discrétion, Mazzy Star le fait toujours très bien. Le duo composé de Hope Sandoval et de David Roback a atteint un statut de groupe culte suite à leur long hiatus (17 ans!) maintenant terminé et leur fantastique Fade Into You, une des plus belles chansons des années 90. Seasons of Your Day se comporte comme si rien n'avait changé, la voix éthérée de Sandoval, une instrumentation simple et efficace, une production légère, et une musique qui a parfois tendance à se placer en fond sonore, comme si elle n'était pas vraiment là.

Le crew Odd Future/OFWGKTA a peut-être dépassé son quart d'heure de gloire, avec les récentes sorties en demi-teinte de Tyler, The Creator et Earl Sweatshirt. Le plus gros succès du groupe vient de Frank Ocean, qui s'en est relativement détaché, tout comme The Internet, composé de Matt Martians et du DJ attitré d'Odd Future, Syd tha Kyd. Et là, surprise : Syd sait chanter, et elle le fait même très bien. Feel Good n'est pas un album parfait et le groupe devrait encore s'améliorer, mais Dontcha est digne des meilleures productions laidback de Pharrell. Une bonne surprise.

Après quelques mois de retard et un paquet de singles, le premier album de Splashh peut enfin sortir, et est conforme aux attentes, un sympathique retour à l'indie rock des années 90, tant UK (My Bloody Valentine, Jesus & Mary Chain) que US (Pixies). Rien de nouveau, peut-être, mais la production psyché/garage à souhait empêche Comfort d'être bêtement considéré comme une copie carbone de ses glorieux prédécesseurs. S'ils se mettent à écrire des bonnes chansons mémorables, leur second album pourrait être énorme. The Strypes se sont fait connaître par leurs concerts énergiques, endiablés et anachroniques : ces très jeunes gamins jouent comme s'ils vivaient dans un univers parallèle où "RnB" n'a jamais changé de sens. Alors oui, c'est entraînant et paradoxalement original, le guitariste a un ratio âge/prouesses techniques impressionnant, mais les chansons sont évidemment très typées (notamment au niveau des paroles qui auraient déjà été ridicules en 1961), et l'album (Snapshot) souffre d'un évident manque de variété. Ce qui s'est passé avec Yuck est assez étrange : le frontman Daniel Blumberg est parti, et le guitariste Max Bloom l'a remplacé au chant. En résulte un second album (Glow and Behold) moins percutant mais tout aussi appréciable, rappelant plutôt le shoegaze que le proto-grunge, pour ceux qui aiment bien les bêtes étiquettes. Mais on dirait vraiment un autre groupe. Joanna Gruesome rejoint Yuck dans la catégorie des noms pourris, mais aussi un peu dans les influences, très 90s. Mais Joanna Gruesome est moins carré et nettement plus fun. Même si pas aussi fun que le premier album (Run Fast) de The Julie Ruin, le nouveau groupe totalement extatique de Kathleen Hanna.

Ce mois-ci, on a Placebo, aussi. Loud Like Love sonne comme Placebo depuis dix ans, des rimes fatiguées (gay/Champs-Élysées/communiqué/superhighway), deux ou trois morceaux passables, rien de mauvais mais rien de bien utile non plus. Quelque part entre admirable (de longévité) et pathétique mais au moins, pas de dubstep. Balance and Composure cogne beaucoup plus fort, et est aussi nettement plus intense que le trio de Molko, au moins eux ne font pas semblant. Parfois limite pop-punk, parfois carrément emocore, The Things We Think We're Missing est peut-être l'album rock du mois : rien que le fait qu'on pense encore à faire ce genre de musique, ça fait beaucoup de bien. Et la voix du chanteur me fait penser à Roddy Idlewild. C'était bien, Idlewild, au début. Encore un échelon au-dessus niveau intensité et pur volumé sonoré, Touché Amoré. Leur truc, ce sont des cocktails molotov à base de puissance pure et de sentiments à fleur de peau, mais cette fois, ils augmentent la longueur des morceaux (de 1 à 2/3 minutes, en gros) et améliorent leurs compositions.

Le Ty Segall du mois, c'est Fuzz, qui ne pouvait pas mieux porter son nom. Segall chante et joue de la batterie, c'est Charlie Moothart qui est cette fois à la guitare. Musicalement, c'est évidemment solide, mais les morceaux partent parfois dans tous les sens et auraient peut-être bénéficié d'un peu plus d'attention et d'édition. Mais Segall est probablement en train de travailler sur sept autres albums alors que j'écris péniblement ces lignes. Vista Chino, c'est Kyuss. Enfin, c'est Kyuss sans Josh Homme et sans les problèmes de justice causés par ce dernier. Donc, Vista Chino, Peace. Musicalement, ils ressemblent plus à Kyuss qu'aux Deftones (mon dieu, que c'est drôle) : guitares stoner comme au bon vieux temps (même si elles sont l'oeuvre du guitariste belge Bruno Fevery), Brant Bjork à la batterie, Nick Oliveri à la basse quand il prend la peine de venir jouer, et évidemment la voix de John Garcia. Un peu comme les Foo Fighters, c'est un peu étrange de voir Queens of the Stone Age avoir un tel succès actuellement mais voilà, heureusement, "Kyuss" vit toujours.

Quant à Lou Barlow, il a récupéré deux groupes, car c'est maintenant Sebadoh qui sort son premier album en quatorze ans. De nouveau lo-fi, Defend Yourself renoue avec l'essence du groupe tout en étant malheureusement/forcément trop inégal. Girls Against Boys revient également à notre meilleur souvenir, avec un EP cinq titres (The Ghost List) qui laisse augurer de bien bonnes choses. Et en parlant d'EP, celui de Fishboy (IMAVOLCANO), complètement cinglé mais tellement catchy, vaut le détour. Brandon Boyd continue son chemin en parallèle d'Incubus avec l'album de Sons of the Sea, le projet qu'il forme avec le mégaproducteur/multi-instrumentiste Brendan O'Brien (je pense que Brandon et Brendan aurait été un meilleur nom, mais qu'est-ce que j'en sais, moi). L'album est solide sans être extraordinaire, mais il a au moins l'avantage de ne pas être automatiquement comparé à Make Yourself. Par contre, ce n'était pas une bonne idée de sortir quatre des meilleurs morceaux de l'album en EP voici quelques semaines...

Pour terminer, on n'oubliera certainement pas deux boxsets de grande qualité. D'abord, Sound System de The Clash, soit leurs cinq albums studio (ne leur parlez jamais de Cut the Crap) et trois disques de démos, raretés et morceaux live. Sans aucun doute le document définitif d'un des groupes les plus importants de l'histoire du rock 'n roll. Ce qui est aussi, n'en déplaise à certains, le cas de Nirvana. Leur dernier album, In Utero, fête ses vingt ans avec un remaster, l'ajout de démos et du concert Live and Loud. Mais surtout, il ajoute une nouvelle version de l'album, un mix complémentaire inédit réalisé par Dave Grohl, Pat Smear, Krist Novoselic et Steve Albini. Parfois très surprenant, il offre une vision différente et probablement plus proche de ce que le groupe voulait avant que Geffen ne foute la merde pour vendre des disques. Au risque de paraître révisionniste, je pense préférer ce nouveau mix.

Ah oui, et si quelqu'un veut m'expliquer Haim, je suis prêt, quand vous voulez.

Trente-deux morceaux dans le playlist Spotify, avec quelques ajouts de morceaux d'albums à venir, comme Jake Bugg ou le nouveau projet de Bertrand Cantat, Détroit.

Enjoy!

mercredi 11 septembre 2013

Juillet - Août 2013

Avec beaucoup trop de retard, voici le récapitulatif juillet / août 2013. L'été est rarement propice aux sorties nombreuses, mais la fin du mois dernier était assez remplie, ce qui peut expliquer le retard de ce post (en tout cas, c'est mon excuse).

Le choix de l'album du mois était encore assez difficile, mais on devrait y voir un peu plus clair à la fin de l'année, 2013 est un très bon cru. Mais s'il faut faire un choix alors, ça sera...

Slave VowsThe Icarus Line - Slave Vows. J'avoue avoir perdu Icarus Line de vue, mais quelle erreur. Slave Vows est intense, puissant, rappelant toute l'histoire du punk rock tout en restant actuel, alliant longs morceau (le premier fait 10 minutes) et brûlots blues-punk. L'instrumentation est parfaite, progressive sans être prog, cathartique sans être emo.

Grant Hart - The Argument. Grant Hart, c'est le compositeur de Hüsker Dü qui n'est pas Bob Mould. Bien que le dernier Mould soit très bon, ici, on frôle le grandiose. The Argument est un album concept sur (accrochez-vous) l'adaptation de William Burroughs du poème "Paradise Lost" de John Milton, et permet à Grant Hart de composer dans une myriade de styles (pop, punk, opera rock, honkytonk, comédie musicale, gospel, Arcade Fire, Pixies, noise, garage, ukulele, Guided By Voices) tout en restant excellent de bout en bout, un véritable tour de force.

Pour terminer le podium, Fuck Buttons - Slow Focus. Étrangement accessible, moins porté noise que leurs précédents albums, Slow Focus est fascinant et fourmille de trouvailles sonores. Alors que 80% des artistes repris dans cet article regardent derrière eux, Fuck Buttons n'a qu'un seul chemin, et il est droit devant.

Superchunk balance son second album post-comeback, et I Hate Music se place sans problème au sommet de leur excellente discographie (en fait, ils sont tous au sommet). Rien de "nouveau", mais tout a déjà été dit et fait, non?

Franz Ferdinand tente de renouer avec l'insolente facilité de leurs débuts, et y arrive partiellement sur Right Thoughts, Right Words, Right Action : punchy, bien écrit, plus immédiat que Tonight et plus varié que leur début. L'effet de surprise est passé, mais on aurait pu avoir bien pire. Puis, la voix d'Al Kapranos.

Un nouveau groupe anglais venant de Sheffield, le duo Drenge allie setup classique guitare/batterie avec une tentative d'aller du côté obscur de la pédale fuzz. Plus Mudhoney que White Stripes, Drenge est à surveiller pour le futur, surtout si Arctic Monkeys continuent à les prendre sous leur aile (on a vu ce que ça a fait à Miles Kane). Même setup, même nombre de musiciens mais influences plus blues-punky pour Deap Vally. L'album (Sistrionix) est trop inégal, mais quand il est bon, il est excellent. Et quelle attitude, aussi.

Niveau revivalistes rock n' roll, l'Australie est toujours aussi bien fournie, ce mois-ci avec le duo Jagwar Ma (Howlin). Adoubé par Noel Gallagher, on comprend pourquoi, ils naviguent en plein Madchester. Sympa, et au moins, ce n'est pas Wolfmother. Pond (Hobo Rocket) partagent des musiciens avec Tame Impala, et aussi des tonnes d'influences. Mais ils semblent se prendre moins au sérieux, ce qui fait un album moins "bon" mais tout aussi appréciable. Hebronix, c'est l'ex-chanteur et guitariste de Yuck, Daniel Bloomberg. Yuck continue sans lui, et Bloomberg sort un album solo aux formes variables et morceaux longs : clairement, c'est lui qui apportait l'influence J Mascis au sein de Yuck. Pas toujours facile à digérer d'une traite, Unreal est un début impressionnant, même si Bloomberg est loin de son coup d'essai. Quant à Crocodiles (Crimes of Passion), ils me semblent en surplace fuzz-pop légèrement shoegaze. Pas mauvais, mais qui n'avance pas recule.

Sauf erreur de ma part, 2013 n'a pas encore vu d'album de Ty Segall. En attendant son nouveau et bien nommé groupe Fuzz, Segall sort un album acoustique (Sleeper) montrant que son talent n'a aucune limite, il s'attaque à la folk, à l'alt-country, à Marc Bolan et Nick Drake avec bonheur et réussite totale. Ce type est un génie.

Jolie surprise ou révélation avec le premier album de HBS, alias le bassiste de Soundgarden Ben Shepherd. In Deep Owl est exactement ce qu'un album solo d'un musicien de groupe doit être : varié, risqué, personnel et bien différent de son boulot habituel. Sauf exceptions (Baron Robber, le plus SG du lot), les morceaux sont de nature alt-folk, faisant parfois penser à Mark Lanegan. Naturellement, la basse est proéminente, et la batterie (quand il y en a) est notamment fournie par deux ex et actuel Pearl Jam, Matt Chamberlain et Matt Cameron.

En parlant de Matt Cameron, il est aussi à l'honneur avec le projet inécoutable du mois, un trio de batterie avec Janet Weiss et Zach Hill (oui, l'autre cinglé de Death Grips), appelé Drumgasm. Ils cognent sur leurs fûts pendant 40 minutes, et passé les 10 premières où il est amusant de reconnaître le jeu de malade profond de Hill, j'avoue avoir très peu professionnellement arrêté les frais. Merci de me dire si j'ai loupé un cameo de Phil Collins.

Je sais qu'il y a peu de metal sur Music Box, mais j'écoute fort peu de metal depuis quelques années. Mais avant, quand j'étais jeune et suffisamment courageux pour me perdre dans un moshpit, j'écoutais Pantera, dont le chanteur Phil Anselmo vient de sortir son premier album solo, Walk Through Exits Only. Rageux, puissant, violent, c'est vraiment Phil Anselmo. Et j'espère de tout mon coeur qu'il ne cédera pas, ne reformera jamais Pantera et laissera Zack Wylde dans son club de strip-tease.

Je dois aussi parler de Diarrhea Planet et I'm Rich Beyond Your Wildest Dreams (2013 a beaucoup de bons groupes au nom stupide). Ils ont plein de guitaristes qui jouent tous en même temps, ont écouté Kiss bien trop souvent et sonnent comme une version moins fatigante et plus variée d'Andrew WK. Oui, il y a des groupes nettement plus intéressants en terme de variation sonores, mais pas aussi fun. En parlant de fun, il faut écouter au moins une fois (ça va très vite) le nouveau Hunx and His Punx, Street Punk qui est rapide, féroce et ne se prend jamais au sérieux, comme en témoigne la reprise d'un très vieux morceau des Beastie Boys, Egg Raid on Mojo.

Je parle rarement des albums qui m'ont déçu, parce qu'il y a tellement plus de bonnes choses à écouter, mais l'album - fort attendu - de No Age m'a déçu. Je cherche toujours les mélodies, voire les chansons de An Object : les projets artistiques, c'est bien mais c'est encore mieux quand ils fonctionnent.

En ce qui concerne les EP, quelques sorties majeures également, notamment les premiers morceaux de Pixies depuis leur reformation (EP1), si l'on excepte le très vite oublié Bam Thwok. Maintenant, Kim Deal est partie, et ces morceaux sont loin d'arriver à la cheville de ce qui a garanti au groupe une place légendaire. Il paraît qu'ils vont régulièrement publier du nouveau matériel, on espère qu'il sera meilleur que celui-ci. Mais l'idée de nouvelle musique de Pixies en 2013 reste incongrue. Pour Bloc Party, c'est encore pire, et les rumeurs de split vont certainement ressurgir après ce Nextwave Sessions simplement mauvais. Les toujours impeccables Future of the Left ont aussi un EP 4 titres (Love Songs for Our Husbands) en prévision de leur quatrième album (un de plus que Mclusky!), et bien qu'ils semblent avoir rangé les synthés au garage, ils n'ont rien perdu de leur rage. Enfin, des membres de Into It. Over It, Owen et American Football ont créé Their / They're / There, un groupe emo-math rock au nom phénoménal et dont le premier EP 6 titres est tout à fait recommandable.

Le mois de septembre est traditionnellement un des plus chargés de l'année, et 2013 ne fait pas exception. En attendant, voici le playlist Spotify été 2013, avec malheureusement quelques trous, comblés par des morceaux d'albums à venir plus tard cette année (Arcade Fire, Wolf Alice, et, euh, Lady Gaga).

samedi 31 août 2013

Pukkelpop 2013 : compte-rendu

Évidemment avec un peu de retard, voici mon compte rendu du Pukkelpop 2013 ou plus exactement du jeudi 15 août, premier jour du festival. Je l'ai peut-être déjà écrit auparavant, mais les festivals, je n'en fais plus. Trop de monde, trop cher, performances artistiques rarement au niveau des concerts et salle, etc etc. Mais bon, une fois de temps en temps, si l'occasion se présente, je m'octroie le droit d'aller voir des groupes que je n'ai jamais vu (Pavement aux Ardentes, Faith No More au Pukkelpop) ou, dans ce cas-ci, une affiche particulièrement intéressante pour moi.

Pukkelpop 2013On le sait, le coup de génie du Pukkelpop, c'est de commencer le jeudi, et donc d'éviter la concurrence des festivals du même weekend (Lowlands, plein de trucs en Allemagne qui changent de nom chaque année) tout en profitant des groupes qui sont en tournée des carnavals européens. Le jeudi était de loin la journée la plus intéressante du weekend, encore plus suite à l'annulation de Neil Young le lendemain.

Ma journée a commencé assez tôt de de manière surréaliste, avec Oathbreaker dans The Shelter. The Shelter, c'est la scène punk/hardcore/metal, et elle se trouve tout au fond du site, il est assez difficile de s'y trouver par hasard. Et Oathbreaker, c'est un groupe belge qui marie joliment black metal et hardcore (leur dernier album est sorti chez Deathwish Inc. et est produit par Kurt Ballou de Converge). On a donc eu ce mélange réussi vers midi, avec des lumières stroboscopiques, des canons à fumée et la voix inquiétante de la chanteuse Caro.

Arrivait ensuite, dans le Club (la plus petite scène "majeure") Mikal Cronin, auteur d'un de mes albums de l'année et qui était en train d'installer son équipement quand je suis arrivé, tranquillement, m'installer devant lui. Même si c'était, selon Cronin, "the biggest tent we've ever played", il était encore trop tôt pour la remplir (même si c'était quasi le cas toute la journée, on y reviendra). Pourtant, Cronin et son groupe étaient impeccables, jouant une quarantaine de minute de pop songs parfaites extraites de ses deux albums solo. Et malgré deux cordes cassées (sur douze, heureusement) tout au début, il a continué comme si de rien n'était. Classe.

Retour sous le Shelter pour la fin des Menzingers, impeccable groupe punk qui m'a toujours fait penser à un Gaslight Anthem qui aurait gardé l'esprit punk. Excellentes chansons à scander, rien à dire. Ensuite, Parquet Courts, qui confirme sur scène leur réputation de Pavement punk, c'est bordélique, chanté par plus ou moins tout le monde, mais c'est aussi très bien. Je me fais ensuite entraîner de nouveau au Club pour rencontrer un ami (coucou Julien) mais je me fais aussi bien chier, parce que déjà que sur disque, je n'ai jamais compris la dithyrambe autour d'Allah-Las, mais sur scène, c'était, donc, chiant. Pas mauvais du tout, juste répétitif.

Autre must-see de ma journée, Surfer Blood, dont l'album Pythons sera probablement dans mon top 10 2013. Le concert était aussi fort bon, avec une majorité d'extraits de leur premier album. Le bedonnant chanteur John Paul Pitts s'est promené dans le public avant d'emmener son groupe dans un final plein de feedback et de bonheur, c'était bien. À un moment de la journée, j'ai vu Kendrick Lamar sur la grande scène, je pourrai donc dire que je l'ai vu quand il sera devenu la mégastar interplanétaire qu'il est censé être. Mais je n'avais pas le temps (enfin, disons que j'avais fait mes choix).

Parce que les choses sérieuses allaient commencer avec Deftones, un de mes groupes préférés de tous les temps, simplement. Et après les avoir vu pour la première fois il y a une quinzaine d'années, cela fait un bien fou de les retrouver en meilleure forme qu'à l'époque, et avec une discographie récente exceptionnelle, ce qui n'est le cas d'aucun de leurs contemporains. En une petite heure de concert, impossible d'avoir une longue setlist, mais le groupe a pioché dans presque tous ses albums : mention spéciale à Elite chanté (hurlé) dans le public, la merveilleuse Sextape ou un final avec deux morceaux d'Adrenaline, pour le bon vieux temps. Malgré la tragédie qui a frappé le groupe (l'accident suivi du décès du bassiste Chi Cheng), il a réussi à garder la tête très haute, notamment grâce à un remplaçant de choix, Sergio Vega. Un Sergio Vega qui faisait double emploi, car il jouait également avec Quicksand, légende du post-hardcore emmené par Walter Schreifels, aussi membre de Rival Schools et Gorilla Biscuits. C'est là que la fatigue a commencé à se faire sentir, et je n'ai pas pu apprécier Quicksand assez longtemps, malheureusement. Les festivals, sur papier, c'est très bien, mais en vrai...

Un peu comme Miles Kane, tiens. Je l'aime bien, ses compos sont chouettes même quand ce n'est pas Alex Turner qui les écrit, et son groupe est bon, même quand Alex Turner n'est pas là. J'ai juste du mal avec sa voix, mais c'est très personnel. Mention spéciale à son code vestimentaire qui l'oblige à porter un col roulé sous les projecteurs du Marquee.

En me dirigeant vers la grande scène, pour ne pas être trop loin pour Nine Inch Nails (m'empêchant d'ailleurs de voir Johnny Marr massacrer des chansons des Smiths), j'ai été jeter un oeil sous le Club où jouait Glen Hansard et une fanfare de 350 personnes au moins. Ce qui change beaucoup de ses concerts en solo. Pas mieux, pas moins bien, juste différent. Mais un festival n'est pas non plus le meilleur endroit pour apprécier cet artiste unique sous bien des aspects.

Nine Inch Nails, donc. Mes efforts étaient inutiles, j'aurais pu facilement me retrouver assez près de la scène tant le public ne semblait pas intéressé... Pourtant Trent Reznor, de retour en tant que NIN après cinq ans, apporte un show grandiose avec murs de LED, écrans mobiles et mise en scène très précise faisant la part belle aux cinq musiciens qui changent constamment d'instruments. Mais Reznor a toujours eu un tempérament disons, imprévisible : il n'a pas apprécié de commencer en plein jour et encore moins de jouer devant un public majoritairement composé de fans d'Eminem attendant le retour du fils prodigue. En "punition", il n'aura pas joué ses deux morceaux les plus célèbres (Closer et Hurt), terminant le concert dix bonnes minutes à l'avance. Heureusement qu'il était irréprochable, le concert, mêlant nouveaux morceaux (Copy of a, Came Back Haunted) et anciens parfois réarrangés (Sanctified), passages instrumentaux intenses (Help Me I Am In Hell) à un barrage final de hits (Only, The Hand That Feeds, Head Like a Hole). Ceci dit, à Reading, T-Rez a fait encore mieux : fâché de jouer avant Biffy Clyro, il a complètement réarrangé son set en ne jouant aucun hit.

Dernier passage par le Club pour voir Savages de loin, aussi intense que prévu, mais j'avais faim, mon ami et grand esthète Arnaud aussi, la vie est une question de choix et de priorités.

À partir de là, tel deux saumons remontant les rivières, nous avons bravé les armées de fans d'Eminem (sérieux, c'était dingue) pour nous retrouver de l'autre côté du site, passant à côté de Hurts qui avait attiré la grande foule, pour finir au premier rang d'un Shelter probablement décimé par ce qui est passé avant, j'ai quand même loupé Fucked Up et The Bronx. Mais je n'allais certainement pas rater Alkaline Trio, groupe de mon coeur et de maintes crises existentielles. J'étais même par hasard au premier rang, mais quand tu es au premier rang du concert d'un groupe dont tu connais tous les morceaux, et que tu n'as pas la moindre idée de ce qu'ils jouent, soit c'est Radiohead, soit le son est pourri parce que tu es trop près. Je me suis reculé, recentré, et c'était tout de suite nettement mieux. Une heure d'Alkaline Trio, c'est peu (même si nettement trop pour mes compagnons d'un jour qui ont quitté la tente, voire le site) mais Messieurs Skiba, Andriano et Grant ont fait un maximum, piochant dans presque tous leurs albums, passant d'un chanteur à l'autre pour un set sans temps mort, sans point faible. S'il y avait un Dieu, il devrait les bénir.

Il était alors 1h du matin, mes pieds étaient en compote, mon dos une autre métaphore fruitée, mais ce n'était pas fini, oh non... Car dans le Marquee allaient commencer ces sauvages punk cinglés de Godspeed You! Black Emperor. Alors, oui, j'aime beaucoup GYBE. Leur dernier album est fabuleux, et leur concert était magique, une dizaine de musiciens qui jouent 3 morceaux en 1h30, des morceaux qui vivent, qui évoluent, des musiciens qui se nourrissent les uns des autres. Mais à ce moment-là, dans cet état physique, c'était assez dur à supporter. Mais un peu comme un concert de My Bloody Valentine, ou de Fucked Up justement, c'est une expérience physique intense, et c'est ça aussi, la musique : une expérience physique.

C'était donc aussi bien que possible, ce Pukkelpop 2013, on pardonnera même à Trenty son ptit caca nerveux. Mais comme évoqué plus haut, je continue à penser qu'un festival tel que celui-ci, c'est comme un repas qui sent meilleur qu'il ne goûte. Les clashes horaires, le son souvent à la ramasse, des sets toujours courts voire raccourcis, un public absent (mais heureusement pas hostile, on n'est pas en UK) : c'est l'évidence même de le dire, mais les concerts en salle, c'est quand même mieux. Malheureusement, l'état actuel de l'industrie musicale et l'insignifiance générale de ce pays en termes de salle de taille décente (plus grand que l'AB, plus petit que le Sportpaleis, moins pourri que la Lotto Arena) font que beaucoup de ces groupes (au hasard, NIN, Deftones, Alkaline Trio, Eminem, et j'en passe) ne s'arrêteront ici que pour jouer à Werchter/Dour/Pukkelpop. C'est donc ça, ou rien. Même si c'est souvent rien, parfois, je choisis ça. Et je ne le regrette pas.

edit : j'ai honteusement oublié de dire que j'ai aussi retrouvé mon pote Tony avec qui j'ai vu Deftones, et qui a écrit un compte-rendu des trois jours (parce que lui, il est cinglé) sur son excellent blog, Music Doesn't Exist in my Country.

mardi 2 juillet 2013

Juin 2013

La saison des festivals bat son plein, c'est pourquoi on n'a pas eu beaucoup de sorties majeures ce mois-ci, et il y en aura encore moins les deux prochains. Ceci dit, c'est le mois qui a été choisi par une myriade de labels indés pour caser des albums plus excellents les uns que les autres : 2013 est déjà une grande année.

Cet article est un peu différent des précédents : vu l'abondance des sorties, le retard accumulé et le fait que la partie déjà écrite me semble mauvaise, j'ai choisi un style plus rapide, avec moins de longues phrases que plus personne ne semble lire de nos jours.

Album du mois : Queens of the Stone Age - ... Like Clockwork.

Like ClockworkLeur premier en six ans, il a pourtant été reçu de manière mitigée, sans doute parce que certains attendaient beaucoup plus de bourrinage à la Songs for the Dead (album que j'aime beaucoup, ceci dit). Certains (les mêmes?) se sont aussi sentis floués par les special guests qu'on entend/distingue à peine (Grohl, Reznor, Lanegan, etc). Tout ce monde là est totalement passé à côté d'un album varié, sans temps mort et d'une grande créativité. Oui, Queens of the Stone Age a toujours été le projet de Josh Homme (comme Nine Inch Nails pour Trent Reznor) et c'est très bien comme ça.

Mentions très spéciales : Surfer Blood - Pythons. Il aurait peut-être été mon album du mois sans ça. Groupe rock aux influences pop, Surfer Blood nous ramène à une époque insouciante, aux alentours de l'album bleu de Weezer. Mais aussi Smith Westerns - Soft Will (psychétastique), These New Puritans - Fields of Reeds (sans exagérer, le Kid A de 2013), Eleanor Friedberger - Personal Record (dans mon utopie, elle serait Beyoncé), Palms - Palms (Isis + Chino Moreno, rien à dire de plus), City and Colour - The Hurry and the Harm (c'est beau, triste, mais beau), Camera Obscura - Desire Lines (c'est beau, et moins triste), I Is Another - I Is Another (dream team emopostmachin entre Ian Love et Jonah Matranga), Sigur Rós - Kveikur (plus musclé que d'habitude, tant mieux) ou encore Boards of Canada - Tomorrow's Harvest (bande originale d'un film irréalisable). Ah, et Electric Soft Parade - Idiots, toujours impeccables.

Ce mois-ci a aussi vu la sortie d'albums de quelques unes de mes découvertes récentes : Deafheaven - Sunbather (shoegaze metal?), Aye Nako - Unleash Yourself (punk féministe), Bass Drum of Death - Bass Drum of Death (lofi garage machin) ou encore Haust - No (punk hxc norvégien).

Et on doit aussi parler de quelques gros trucs sortis en juin, comme Black Sabbath - 13 (étrangement décent), Kanye West - Yeezus (meilleur que Random Access Memories), Miles Kane - Don't Forget Who You Are (la vie sans Alex Turner semble bien se passer), Beady Eye - BE (Dave Sitek ne remplace pas l'absence de bons morceaux), CSS - Planta (idem), Jimmy Eat World - Damage (passé, peut-être, mais toujours impeccable), Stone Gossard - Moonlander (guitariste de Pearl Jam avec des morceaux meilleurs que le dernier Pearl Jam), Sons of the Sea - Compass EP (alias Brandon Boyd avec des morceaux meilleurs que le dernier Incubus).

Une fois de plus, désolé pour le caractère "liste" de cet article, mais c'était ça où 90 000 caractères publiés fin 2016. Si j'ai oublié quelque chose, merci de me le faire remarquer en commentaire (Andrew Stockdale c'est volontaire, et Guitar Wolf m'a assez déçu).

Voici l'habituel playlist Spotify (30 morceaux, shuffle mode recommandé) avec une grande majorité de ces albums dedans, mais aussi quelques morceaux d'albums à venir plus tard (Arctic Monkeys, Nine Inch Nails, The Strypes). On se revoit dans un mois, achetez des vinyles et ne regrettez jamais rien.

lundi 3 juin 2013

Mai 2013

Devinez quoi, mon album du mois, c'est pas Daft Punk. Pas que je n'aime pas spécialement Daft Punk, surtout le premier album et leur live, que je trouve excellent dans le genre. Mais je ne n'ai pas grand chose à faire du disco, du funk, de Pharrell Williams post-2006 (environ) et des vieux types qui racontent leur vie sous fond de bande originale de film érotique du vendredi soir. Je reconnais que le pastiche est souvent excellent, on s'y croirait, mais je n'ai aucune envie de m'y croire, je veux y être.
Mikal Cronin - MCIIJ'ai eu du mal à le nommer, mon album du mois. Ce n'est pas Savages. Leur album (Silence Yourself) frôle aussi le pastiche et aurait pu être fait plus ou moins à n'importe quelle année suivant le vingt-troisième anniversaire de Ian Curtis, mais ce n'est pas une mauvaise chose, tant les musiciennes sont excellentes et l'ambiance suffocante. Mais cette impression de supériorité arty est un peu irritante, tout comme les paroles "polarisantes" de Camille "Jehnny Beth" Bertomier. Mais pour un premier album, il est très abouti, mais à l'image de sa pochette : monochrome.
Ce n'est pas Vampire Weekend non plus, même si Modern Vampires of the City est très bon, probablement leur meilleur. Les paroles d'Ezra Koenig sont intelligentes sans enfoncer le clou sur leur intelligence, et la recherche sonore de Rostam Batmanglij ne semble connaître aucune limite. Mais je le trouve inégal, des morceaux extraordinaires (Step, Ya Hey) côtoient l'ordinaire sans beaucoup de relief (Obvious Bicycle est étrangement placé comme premier morceau). Mais personne ne fait ce que Vampire Weekend font, et ils le font encore mieux qu'avant.
Et ce n'est pas The National. Pourtant, Trouble Will Find Me est irréprochable de raffinement musical, avec une voix phénoménale et même parfois un peu d'humour. Mais ses qualités sont aussi son principal défaut : c'est exactement ce qu'on attendait de The National, et après High Violet, il fallait faire mieux, ce qui était probablement impossible.
Non, mon album du mois, c'est Mikal Cronin - MCII. Fidèle collaborateur de Ty Segall (vous savez, celui qui a placé trois albums dans mon top 30 2013 et qui en a encore au moins deux à venir cette année), Cronin est aussi/surtout un excellent songwriter pop-rock, capable de transformer mélodies et émotions en pépites lo-fi de trois minutes. L'album n'est pas impressionnant en tant que tel, il semble juste tellement facile que c'en est irréel, quasi tous les musiciens de cet article vendraient leur carrière pour écrire comme Cronin. Et même si ce n'est sans doute par le "meilleur" album de ce mois-ci, c'est mon préféré.
En mai, on a aussi eu le premier album de MS MR (Secondhand Rapture), un an après leurs débuts. Je ne sais pas pourquoi Wikipedia les comparent à Lana Del Rey, parce que c'est nettement mieux. La scène post-punk de Copenhague se porte toujours très bien, comme le prouve Vår, offshoot de Lower et Iceage, notamment. Dans No One Dances Like My Brothers, Vår troque la violence claustrophobique de ces derniers contre des synthés atmosphériques, des percussions militaires et la voix d'un jeune Robert Smith. Fascinant. La carrière de Primal Scream est faite de hauts et de bas, personne ne pourra le démentir. Malgré quelques longueurs et une pochette invraisemblable, More Light tombe dans la bonne catégorie, c'est même une excellente surprise de la part d'un groupe dont on n'attendait pas grand chose. Et qu'est-ce qu'on attend d'un nouvel album de The Fall, alors? Même si le lineup est stable depuis quelques années, il souffle le chaud (Your Future Our Clutter) et le froid (Ersatz GB). Ici aussi, bingo, parce que Re-Mit est tout à fait recommandable.
Déception par contre pour Alice in Chains. The Devil Put Dinosaurs Here est le second album depuis que William DuVall a remplacé vocalement Jerry Cantrell, ce dernier ayant endossé le rôle de Layne Staley (j'insiste) mais il semble nettement en deçà de Black Gives Way To Blue, la faute aux tempos trop similaires et aux morceaux beaucoup trop unidimensionnels. C'est loin d'être un mauvais album, mais le problème, c'est qu'il ne sert à rien. L'influence d'Alice in Chains est évidente chez Kylesa, mais leur sixième album est nettement plus ambitieux, varié et intéressant. Ultraviolet part un peu dans tous les sens, mais quand on a tellement d'idées, il est difficile de se contenir. Si je l'avais écouté une semaine de plus, il aurait peut-être été mon album du mois.
Beaucoup d'idées chez la famille DuPree d'Eisley et leur quatrième album, Currents. Inattendu et étonnant, l'album fait la part belle aux changements de rythmes et arrangements ambitieux (ce qui ne veut pas nécessairement dire chiants). C'est aussi un album qui s'enrichit au fur et à mesure des écoutes, une très belle réalisation. Il nous reste encore à parler de Public Service Broadcasting, dont le mix d'instrumentation live (pas mal de banjo), d'électro et de samples de vieux films d'information publique me font penser à The Avalanches (dont l'unique album a maintenant presque treize ans) via Kraftwerk (Inform - Educate - Entertain). On a aussi, comme tous les mois, un album de Mark Lanegan, cette fois avec le multi-instrumentiste anglais Duke Garwood (Black Pudding). Si vous écouteriez le ténébreux Mark lire le bottin (et qui ne le ferait pas?), c'est pour vous. Et puis, le cas Fauve. Wu Lyf à la française, hype prétentieux sans substance ou collectif révolutionnaire émouvant et existentiel. J'avoue, je ne me suis pas encore décidé (dois-je nécessairement l'être?), mais leur EP Blizzard ne peut pas laisser indifférent. Ne parlez juste pas de "slam".
Beaucoup de choses à venir en juin, notamment le retour de Queens of the Stone Age et une impressionnante série de sorties indés très attendues (Splashh, Deap Vally, Surfer Blood, Smith Westerns, Black Sabbath *rires*). Et même s'il a décidé de signer chez Columbia, qui sait quand Trent Reznor va nous balancer le nouveau Nine Inch Nails?
Playlist Spotify mai 2013 juste ci-dessous, à dans un mois! (et n'oubliez pas le Tumblr)

lundi 29 avril 2013

Avril 2013

Le plus gros mois de l'année en terme de sorties jusqu'à présent. Il y en avait tellement (même sans compter le Record Store Day) que j'en ai fort probablement oublié, merci de me le signaler en commentaire!
Voici une sélection très subjective, n'hésitez pas de me dire ce que j'ai oublié. Je commence avec mon trio d'albums préférés de ce mois d'avril 2013.
The Thermals - Desperate GroundThe Thermals - Desperate Ground. Après deux albums s'éloignant de la lo-fi inventive des débuts, le sixième album des Thermals est peut-être leur meilleur. Intense, court, sans relâche, il se base sur une imagerie guerrière étonnante pour livrer une demi-heure de punk lo-fi parfaite, jouée à toute allure, comme si la vie du power trio en dépendait. Pour paraphraser Banksy, ils ne réinventent pas la roue mais la détruisent en mille morceaux.
J'ai aussi énormément apprécié My Shame is True d'Alkaline Trio, qui sera sans doute l'album que j'aurai le plus écouté cette année (oui, je le sais déjà). Fidèle à une ancienne et fantastique tradition, les meilleurs morceaux du groupe se trouvent sur un EP, Broken Wing, sorti en marge de l'album mais constituant ses 4 bonus tracks en édition digitale. Leur meilleur album en dix ans (voire plus), il a aussi le bon goût de laisser s'exprimer plus que de coutume le bassiste et second compositeur/chanteur Dan Andriano.
Pour terminer le podium, je placerai (de justesse) Milk Music, dont l'album très attendu m'avait initialement déçu, mais plusieurs écoutes m'ont permis de l'apprécier à sa juste valeur. Piochant un peu plus dans le rock classique (version Neil Young) que l'extraordinaire EP Beyond Living, Cruising Your Illusion (titre de l'année, au fait) reste bien ancré dans un passé où Dinosaur Jr n'a jamais quitté SST et où Nirvana a splitté après Bleach.
Derrière tout ça, on en aura eu, des sorties en avril. Des albums, des EP, des anciens trucs aussi. Voire des nouveaux anciens trucs, comme Found de Rival Schools, alias le légendaire second album du groupe, jamais sorti pour cause de séparation, mais qui circulait sur les internets. Walter Schreifels, qui est de nouveau sans Ian Love (comme à l'époque de Found, mais on vous reparle de Ian Love très bientôt) a décidé de mixer tout ça correctement et de sortir un 3e/2e album pour Rival Schools, alors qu'il est toujours occupé avec Gorilla Biscuits et Quicksand. On aura eu, comme toujours, des reissues avec bonus, comme l'unique album de The Postal Service (Give Up) enrichi de deux nouveaux morceaux ou celui de Mad Season (Above) où Mark Lanegan est venu poser sa voix sur trois chutes de studio. Christopher Owens nous a déjà livré une nouvelle version, totalement acoustique, de son joli Lysandre alors qu'Art Brut n'a pas attendu la période classique pour envoyer un sympathique best of, forcément appelé Top of the Pops.
En ce qui concernent les vraies nouveautés, avril était aussi le mois des retours, souvent foirés. Une tentative de raviver les démons (et l'inspiration) du passé n'a pas vraiment réussi aux Yeah Yeah Yeahs (Mosquito), alors que la maturité (et l'exclusion de deux membres fondateurs) n'a pas été très tendre avec Paramore. L'album du même nom est parfois brillant mais beaucoup trop long et ambitieux pour être réussi. Bonus points en ukulélé, par contre. Mais tout cela est déjà mieux que le retour navrant et très surévalué de Fall Out Boy, dont l'exubérant Save Rock and Roll (featuring Courtney Love et Elton John, quand même) a atteint des sommets de vulgarité musicale. Phoenix tape aussi pas mal dans le genre, avec une production puissante et peu subtile. Heureusement, quelque part derrière les presets "Foire du Trône", Bankrupt comprend quelques moments de brillance et de chouettes popsongs. Puis, les paroles jouent la carte d'une certaine autodérision (Drakkar Noir). Deux autres vétérans proposaient aussi un nouvel album. Vanishing Point, le neuvième Mudhoney renoue avec une certaine simplicité mais n'arrive pas à convaincre (sans que cela soit son but, de toute façon) alors que The Terror, le treizième Flaming Lips est encore plus étrange et tordu qu'on ne pouvait imaginer de la part d'un groupe qui est littéralement capable de tout.
Cependant, le titre d'album le plus étrange et tordu du mois revient à The Knife, leur premier en sept ans. Empruntant une structure éclatée (96 minutes, un drone de 20 minutes en plein milieu), Shaking the Habitual porte bien son titre et fourmille d'idées souvent déconcertantes et toujours originales. Mais ce n'est pas une écoute facile du tout, avec peu de points de repère, notamment vocaux. Toujours en indé, j'ai apprécié le premier album de Bleached (Ride Your Heart), deux soeurs qui font de l'indie rock immédiat, catchy, charmant, lo-fi, intemporel et juste chouette. Si les nouvelles chéries du NME Haim arrivent à faire aussi bien, je serais bien surpris. Less is more aussi pour Bored Nothing (il commence à avoir autant de groupe en nothing qu'il y en avait en bear voici quelques années) qui est aussi un projet solo (Fergus Miller, Melbourne) et qui est aussi axé lo-fi sérieusement slacker. L'art étant de réussir à donner l'impression de ne rien foutre tout en sortant des mélodies de génie. Miller n'est pas encore Malkmus mais il se rapproche de Baldi. Ou de Kurt Vile, qui est nettement moins concis : les morceaux de Wakin on a Pretty Daze sont longs, psyché et se perdent souvent en chemin. Vile pourrait être un songwriter nettement plus connu, il se contente d'être excellent.
Merchandise passe la vitesse supérieure, avec leur premier album disponible via un label indé (et gratuitement directement chez eux). Totale Nite ne fait pas de compromis pour autant, 5 morceaux longs et inventifs, qui partent parfois dans tous les sens. Le mystère reste entier. Fantastique titre pour Marnie Stern (The Chronicles of Marnia), dont la musique commence à devenir vaguement accessible, même si sa tendance à sauter d'une idée à l'autre presque aussi vite que ses mains sur le manche de sa guitare reste très désarçonnante. Je dois aussi parler de Dead Confederate (In the Marrow), à qui je n'avais pas vraiment accordé d'attention auparavant, à tort. On parle d'eux comme un mélange entre Nirvana et My Morning Jacket, la réalité est heureusement plus complexe mais tout aussi intéressante. Enfin, de l'autre côté de l'océan Atlantique, on retrouve les oubliés Neils Children, qui ont un peu délaissé leurs guitares pour un son plus synthétique (Dimly Lit), l'ex-guitariste de The Coral Bill Ryder-Jones (A Bad Wind Blows in My Heart) pour un second album solo guitare-piano très touchant.
J'en ai certainement oublié. Guided By Voices et Iggy and The Stooges n'étaient pas encore sortis au moment d'écrire ces lignes, donc j'en parlerai le mois prochain si nécessaire (oui, je respecte les dates de sortie). Par contre, je n'ai pas parlé de Tyler, the Creator à dessein, son album m'a bien emmerdé. Si celui d'Earl Sweatshirt ne remonte pas le niveau,je pense qu'on pourra définitivement enterrer Odd Future, à l'exception évidente de Frank Ocean. N'hésitez pas à me dire ce que j'ai oublié ou faire n'importe quel type de commentaire.
(edit : Thee Oh Sees - Floating Coffin. Excellent aussi, trop de musique en avril. Et j'essaie seulement de comprendre Charli XCX)
Voici le playlist Spotify du mois avec des extraits de chacun de ces albums (ou presque) ainsi que quelques autres petites choses. (Beatallica!) Le playlist n'est pas arrangé du tout, donc shuffle mode fortement recommandé.



On se retrouve fin mai, en attendant, n'oubliez pas le Tumblr et ses mises à jour quotidiennes!

samedi 30 mars 2013

Mars 2013

Même si l'hiver n'en finit pas, le printemps des sorties commence, et avec lui une kyrielle de nouveaux albums avant l'arrivée des festivals d'été. Le mois de mars a vu quelques sorties majeures mais aussi des découvertes (ou redécouvertes) personnelles.


Waxahatchee - Cerulean SaltWaxahatchee, par exemple. Elle (Katie Crutchfield) a sorti son second album début du mois, à mi-chemin entre folk lo-fi et fuzz punkoïde, avec le son de basse de Kim Deal, une voix fantastique et une production sèche qui pourrait passer pour Steve Albini. Bien écrit, varié, Cerulean Salt est une belle découverte, et mon album du mois.


Mars a aussi vu le retour de quelques vieilles gloires plus ou moins avérées. D'abord, évidemment, David Bowie, dont l'annonce de l'album (The Next Day) fut la grosse surprise de ce début d'année. Mais l'autre surprise, c'est la qualité de l'album lui-même. Bowie n'était pas obligé de sortir un album, mais il a fait en sorte qu'il soit bon, étonnamment musclé et digne de sa légende. Puis, il fallait aussi assumer une telle pochette, c'est chose faite. Même si le sport à la mode en ce moment est de raconter un peu partout que l'album est mauvais, histoire de s'attirer un peu d'attention. Retour également pour Depeche Mode, avec un Delta Machine décent mais qui n'apporte pas grand chose, comme si ceux qui furent pionniers autrefois se contentent dorénavant de suivre. Par contre, on peut être surpris par le Bloodsports de Suede, qui prouve que des groupes qui se reforment initialement pour l'argent la nostalgie peuvent aussi toujours créer du nouveau et bon matériel. Finir par quatre ballades consécutives n'était peut-être pas une bonne idée, mais bon, on chicane.


Contrairement à ce que j'avais écrit à l'époque d'Angles, les Strokes existent toujours et sortent leur cinquième album, Comedown Machine. Il faut dire que ce n'était pas gagné, compte tenu du temps de gestation et du résultat médiocre de l'album précédent. Ce dernier n'est pas sans faille, loin s'en faut, mais il sonne comme celui d'un vrai groupe, même s'il est un peu bizarre quand même. On n'aura jamais de second Is This It, le groupe le sait et agit en conséquence. Pour Black Rebel Motorcycle Club, qui a connu le succès en même temps, c'est un peu différent. Specter at the Feast est trop dépendant de leur catalogue et réputation pour être vraiment considéré comme autre chose qu'un album de plus.


Mars a également vu les sorties d'albums de Trent Reznor et Dave Grohl, indépendamment de leur rôles principaux et habituels. Reznor a enfin lancé l'album de How to Destroy Angels (Welcome Oblivion), groupe qu'il forme depuis 2010 avec la chanteuse Mariqueen Maandig, son comparse de BO Atticus Ross et l'artiste visuel Rob Sheridan. Pour mieux apprécier l'importance que Reznor accorde à ce projet, pensez à ceci : il a choisi la semaine de la sortie de l'album pour annoncer le retour de Nine Inch Nails, en pause depuis 2009. Dave Grohl, quant à lui, s'est donné les moyens de réaliser deux rêves en un : un film sur l'histoire du studio californien Sound City et un album de nouveaux morceaux reprenant une liste all star d'artistes ayant enregistré là bas. Malheureusement, la révérence de Grohl envers certains artistes sérieusement AOR empêchent l'album de décoller, malgré des efforts louables de la part de Paul McCartney (Cut Me Some Slack, alias Helter Skelter part II) ou l'hypnotique Mantra, oeuvre de la dream team Grohl / Homme / Reznor.


Comme je vous disais, pas mal de gros trucs, et comme souvent, pas nécessairement les meilleurs. Niveau indie, on a tout ceci, ce mois-ci. D'abord, encore un nouvel album de The Men (New Moon), leur quatrième en quatre ans. Et ils continuent encore et encore une certaine évolution vers une musique plus "classique", tout en restant intense et excellente, peut-être juste un peu moins focalisée. Mais les fans de la première heure pourraient ne pas trop apprécier un virage qu'on pourrait stupidement qualifier de plus commercial. J'avais un peu oublié Devendra Banhart et j'avais sans doute tort : relativement éloigné du freestyle hippie d'il y a quelques années, Mala est un chouette album réfléchi, mélodique, personnel et tout de même un peu débridé. On connaissait Daughter et sa sad-cold-folk-quelque chose comme ça depuis 2010, et le premier album If You Leave (forcément chez 4AD) ne déçoit pas, ou du moins ne change pas d'orientation. Pas très varié, mais pour ce que c'est, c'est très bon.


En montant les amplis et la pédale fuzz, on retrouve Purling Hiss (Water on Mars), qui empoche provisoirement le titre de dévots de Dinosaur Jr. de l'année ; Suuns, dont Images du Futur serait un excellent album s'il n'avait déjà pas été enregistré par Clinic ; Wavves qui s'éloigne de plus en plus du surf rock pour aller faire coucou du côté de Seattle ou encore Golden Grrrls, trio indie-rock énergique, mélodique et catchy de Glasgow (Golden Grrrls). Enfin, après Palma Violets, c'est maintenant Peace qui fait la couverture de NME. Leur album, In Love, n'est pas mauvais du tout, mais je ne suis pas certain qu'il s'agit d'un plagiat, d'un pastiche ou simplement d'un hommage du rock anglais entre, disons, The Stone Roses et Definitely Maybe.


Le mois d'avril sera très chargé en sorties, on en reparle sur le Tumblr et ici dans un mois. En attendant, voici le traditionnel playlist Spotify du mois de mars!


lundi 4 mars 2013

Février 2013

Février a commencé avec une énorme surprise : m b v, l'album de My Bloody Valentine, le premier en vingt-deux ans, n'est plus un rêve, une chimère, un vague projet sans cesse repoussé. On pouvait l'écouter (et depuis quelques jours, le toucher), il existe vraiment. Ce qui est encore plus extraordinaire, c'est qu'il est vraiment très bon, totalement hors du temps, comme son génie géniteur Kevin Shields. J'ai rédigé une chronique pour Shoot Me Again, et il est facilement mon album du mois. Il est suivi de près par Iceage, gang danois de sales gosses qui poussent l'esprit punk très loin, avec une attitude authentique alliée à une manne d'influences très variées qui ont donné un second album (You're Nothing) intense, sans compromis et d'une puissance rare.


mbv


On aura eu moins de "grosses" sorties qu'en janvier mais plutôt quelques extraits et streams d'albums importants à venir (Strokes, Phoenix, Bowie, How to Destroy Angels notamment). Cependant, quelques sorties sont à signaler. Côté UK, Foals aimerait probablement suivre la trajectoire de Biffy Clyro : commencer par un succès critique avant de conquérir les foules. Holy Fire est clairement leur album le plus accessible, mais manque de punch et reste sans doute trop cérébral. Malgré mes efforts et tout le respect que j'ai pour le groupe de Yannis Philippakis, je n'ai jamais pu vraiment aimer Foals.


Johnny Marr et Palma Violets sortaient leur premier album. Pour Johnny Marr (The Messenger), évidemment, ce n'est pas loin de l'abus de langage, il faudrait probablement un mois pour faire la liste des artistes et groupes avec qui Marr a joué. Evidemment anachronique, son album est très bon, même si assez anecdotique. Sa voix juste mais sans grande personnalité nous rappelle pourquoi il a toujours préféré être un peu (et brillamment) en retrait. Pas de carrière à la Smiths, ni même à la Bromheads Jacket pour Palma Violets. Leur début (180) est aussi bordélique que prévu, mais très inégal (= trois bons morceaux, beaucoup de remplissage). Une fois de plus, le NME aurait du la fermer plutôt que de foutre une pression insoutenable sur ces pauvres gars qui méritent de grandir tranquillement.


Heureusement, Veronica Falls (Waiting for Something To Happen) redore le blason de l'indie UK avec un chouette album qui arrive à faire au moins aussi bien que leur excellent premier tout en conservant leur son et leur fraîcheur. De l'autre côté de l'Atlantique, on monte le son avec Pissed Jeans, toujours sans compromis mais de plus en plus précis et dynamique (Honeys), The Bronx qui revient enfin au punk/hardcore intense après leur sympathique parenthèse mariachi (The Bronx IV) ou Screaming Females qui fait suite à l'excellent Ugly de 2012 avec un EP de sept titres (Chalk Tape) plutôt expérimentaux (et cinglés) et qui les voit évoluer comme jamais auparavant. Darwin Deez et Eels ont aussi sorti leurs nouveaux opus, qui ne m'auront pas spécialement marqué.


Shields et Marr ne sont pas les seuls vétérans de retour en ce début d'année. Nick Cave et ses Bad Seeds ont mis de côté les incendiaires Grinderman pour un magnifique Push the Sky Away aérien et limpide, Thom Yorke (Atoms for Peace) a rassemblé Godrich, Refosco, Waronker et Flea pour un Amok suite logique de The Eraser alors que Thurston Moore a réussi un petit exploit avec son nouveau groupe depuis la fin (définitive?) de Sonic Youth : Chelsea Light Moving le voit reprendre sa Fender Jaguar et ses pédales pourries puis son album le plus noisy depuis un sacré bout de temps. Une dernière mention à Fat Goth (Stud), sorte de garage punk math metal plus sérieux que leurs titres de morceaux ne le font penser. C'est sorti en janvier, mais l'auteur de comics Kieron Gillen me l'a fait découvrir récemment, et je pourrais peut-être en reparler bientôt.


(Presque) tout cela est en écoute dans le playlist Spotify, ainsi que quelques extraits d'albums sortant bientôt (et Pulp - After You parce que j'ai oublié la fois passée). N'hésitez pas à me dire en commentaire si j'ai oublié un album ou l'autre, et rendez-vous sur le Tumblr pour des mises à jour quotidiennes.


mardi 26 février 2013

Janvier 2013

Plutôt que de ne rien écrire et de tout balancer fin de l'année, tout en oubliant la moitié de ce qui est sorti, j'ai eu l'idée d'écrire une sorte de récapitulatif mensuel, accompagné d'un playlist des morceaux marquants du mois + de ce qui sortira le mois suivant. J'y ai pensé un peu tard pour faire janvier à temps, mais bon, je fais janvier maintenant, février dans quelques jours, et puis ça sortira en fin de chaque mois. Je prévois aussi une possibilité de rattrapage pour ce que j'aurai évidemment oublié. Soit. Janvier 2013.


Il fut un temps où janvier était un mois dépourvu de sorties intéressantes. Ce n'est plus le cas maintenant, tant d'albums sortent qu'il faut bien les caser quelque part. Et l'année dernière, un des tous meilleurs albums de 2012, Attack on Memory, est sorti en janvier. On ne rigole plus avec janvier, donc. Par contre, décembre... Soit, encore.


La plus grosse sortie de janvier est sans doute Opposites, de Biffy Clyro. Absolument énormes en UK, ce qui n'était pas gagné du tout vu la bizarrerie de leurs trois premiers albums, ils tentent depuis de rester cohérents tout en devenant accessibles. Opposites est très casse-gueule, car c'est un double album. Comme à chaque fois (ou presque?) on aurait pu supprimer quelques morceaux et gagner en compacité, mais rien n'est mauvais, chaque piste se serait battue pour garder sa place. On regrettera peut-être le fait qu'ils n'ont pas trop profité du concept pour varier et évoluer musicalement, prendre un peu plus de risques, quoi. Opposites est quand même très bien, et Biffy Clyro est peut-être le seul groupe rock mainstream (et à succès, n°1 UK) crédible à l'heure actuelle.


THOAP


Mais mon album préféré (je ne parle plus de "meilleur", ça n'a aucun sens) est Out of View, de The History of Apple Pie. Un peu comme The Joy Formidable (on en reparle juste après), les très googlables THOAP ont sorti quelques morceaux depuis 2011, et maintenant enfin leur premier album, un fantastique mélange de mélodies pop dans un océan de guitares fuzz jouées par des musiciens qui regardent sans doute trop souvent leurs chaussures. La voix gentiment sucrée de Stephanie Min fonctionne parfaitement dans un album fun et adorable, même si légèrement anachronique. J'hésite juste entre See You et Mallory comme single de l'année. Pas du mois, de l'année.


The Joy Formidable, donc, ont sorti leur second album, et cela fait du bien d'enfin entendre des nouveaux morceaux. Wolf's Law est un second album tout ce qui est de plus classique, le groupe qui continue sur la même lancée, en raffinant l'écriture. Rien à jeter, mais il ne me semble pas qu'il aura le même impact que The Big Roar, et qu'il permettra au groupe d'accéder à ce qui semble être leurs désirs, le statut de groupe sinon de stade, de grosses salles. Mais ils ont joliment progressé dans les mélodies comme le montrent Silent Treatment ou le cinématique (presque) final The Turnaround, sans oublier des morceaux plus directs comme Cholla ou le New Orderesque This Ladder is Ours. Et The Maw Maw Song, complètement cinglé.


On retiendra aussi le premier album solo de l'ex-Girls Christopher Owens, court album-concept autour d'une certaine Lysandre (oui, Lysandre est un prénom masculin, mais bon, c'est une française - c'est pour rire, hein). Romantique à souhait, l'album est construit autour d'un thème vaguement médiéval que l'on entend à plusieurs reprises le long d'un album qui sert plutôt d'introduction à Christopher Owens en tant qu'artiste solo. Je ne serais pas surpris d'avoir un nouvel album d'ici décembre.


Dans la catégorie indie, on n'oubliera pas Yo La Tengo, avec un Fade presque trop parfait, Everything Everything en mode arty ou Unknown Mortal Orchestra (II) confirmant le talent particulier de Ruban Nielson, peut-être le Kevin Parker de 2013. On a aussi Tegan and Sara (Heartthrob) qui se la jouent (très bien) synthpop, les révisionnistes indie Foxygen, les énergiques, entraînants et sans aucune honte (solos de guitare! trompette! cowbell!) Free Energy (Love Sign) et Parquet Courts, que j'ai découvert grâce à la ressortie de Light Up Gold, sorti tellement intimement en 2012 qu'on peut dire qu'il est vraiment sorti cette année (oui, ça m'arrange). Pensez Pavement avec la tension de Wire.


Un peu plus bruyant, le grand retour de Tomahawk et son all-star band (Mike Patton, John Stanier, Duane Denison et Trevor Dunn) pour un Oddfellows un peu moins tordu que d'habitude, qui rappelle même parfois Faith No More (conséquence de la tournée de réunion?). Bad Religion a sorti son seizième (seizième!) album (True North), mais j'ai surtout accordé de l'attention au gang surf/punk bordélique FIDLAR ainsi qu'à California X, nouveau groupe sludge/punk qui vient du même endroit que J Mascis et le prouve avec brio.


Vous pouvez écouter des extraits de tout cela dans ce playlist Spotify, avec en plus le premier extrait du futur album de Paramore (Now) et le premier morceau solo de Kim Deal (qui vient d'un 7").



À dans quelques jours pour parler ce qui s'est passé en février.

dimanche 3 février 2013

Music Box en 2013

En septembre, cela fera dix ans que ce blog est ouvert. Il y a dix ans, Youtube, Twitter, Facebook n'existaient pas, Myspace avait... un mois. La musique était écoutée (je refuse de dire consommée) différemment, et les blogs de critiques musicales avaient encore une sorte d'intérêt. Maintenant, nous avons accès à beaucoup plus de musique qu'avant, et via nettement plus de moyens aussi. Pour un bien ou pas, je ne me lance pas pour le moment dans ce débat, mais clairement, des services comme Spotify ont révolutionné le domaine.


Depuis quelques années, je publie de moins en moins de chroniques d'albums, ceci pour différentes raisons. D'abord, l'excuse/raison classique du manque de temps (j'en ai moins maintenant qu'en 2003) et de motivation (idem, mais pas que) mais aussi d'un certain manque d'intérêt général. Je n'écrivais pas spécialement pour les autres, mais la multiplication des blogs et webzines + mon manque d'assiduité font que nettement moins de monde passe par ici qu'avant, ce qui n'est pas spécialement motivant. Pour donner une idée, je dépassais régulièrement le millier de visites quotidiennes, maintenant j'arrive à dépasser la centaine dans des rares cas, comme le top de fin d'année.


Plutôt que de promettre un reboot maintes fois annoncé de Music Box, je préfère prendre un peu la tangente  et de (re)lancer deux services complémentaires, Youtube et Tumblr.


Sur la chaîne Youtube de Music Box, je posterai aussi régulièrement que possible des vidéos qui pourraient/devraient vous intéresser, alors que le Tumblr sera mis à jour avec des vidéos, mais aussi des news, streams de nouveaux albums, morceaux et playlists Spotify entre autres choses. Ces deux services ont l'avantage de demander assez peu d'implication de ma part, juste quelques clics quand je tombe sur quelque chose d'intéressant.


Ceci dit, je tenterai de revenir par ici régulièrement, pour poster des articles plus longs, plus complets, mais pas nécessairements des chroniques.


En attendant, allez écouter le nouveau My Bloody Valentine maintenant.

samedi 5 janvier 2013

Top albums 2012 : 1-20 et playlist Spotify

MB2012Avec un peu de retard, voici la dernière partie de mes cent albums préférés de 2012. Elle est accompagnée d'un long playlist Spotify reprenant un extrait de chaque album (sauf les rares qui ne font pas partie du catalogue Spotify) ainsi que des extraits de singles, EP ou albums hors du top 100. Le playlist est très long (110 morceaux, sept heures) et classé par ordre alphabétique, donc shuffle mode chaudement recommandé. Sans plus attendre...


20 Allo Darlin’ - Europe. Allo Darlin’ tourne autour d’Elizabeth Morris, Australienne résidant à Londres, et qui aurait pu être la chanteuse de Belle and Sebastian dans un univers parallèle. Indie pop parfois twee mais jamais prétentieuse, la musique d’Allo Darlin’ est douce, intemporelle et marquée par la superbe voix, l’ukulele mais aussi les paroles de Morris : “They could name a star after you and you’d still be complaining” est peut-être mon vers préféré de l’année. Elle a aussi un certain talent de conteuse, comme Tallulah le montre, et oui, c’est une référence à un autre groupe australien émigré à Londres, The Go-Betweens. Europe est une boîte contenant un rayon de soleil à ouvrir autant de fois qu’on en a envie.


19 And You Will Know Us By The Trail of Dead - Lost Songs. Trail of Dead ont retrouvé la mémoire, et se sont souvenu qu’ils sont un groupe punk aux influences prog et non le contraire.Sans nécessairement revenir à la rage de Madonna, Lost Songs est nettement plus direct et percutant que leurs derniers albums. On y ajoute une bonne dose de thèmes socio-politiques et on obtient un album dense et intense, peut-être un peu trop. Mais c’est leur meilleur album depuis un paquet d’années.


18 The XX - Coexist. Etrange album. Médiocre de prime abord, il requiert impérativement une écoute attentive, un risque démesuré dans une époque de consommation Kleenex effrénée. Mais avec un bon casque, seul, dans le noir, les couches superposées de main de maître par Jamie Smith se confondent, s’alliant aux douces basses et guitares ainsi qu’aux voix séparées ou simultanées de Romy Madley-Croft et d’Oliver Sim, qui chante d’ailleurs nettement mieux. Mais aussi, il fait part belle au silence, instrument à part entière. Pari difficile pour The XX, et son faible impact (comparé à leur début) semble jouer en leur défaveur. Mais je pense qu’ils l’ont réussi.


17 Swans - The Seer. Une des expériences auditives de l’année. Oppressant, puissant, très long (deux heures), des morceaux dépassant les vingt voire trente minutes, un groupe qui existe depuis plus de trente ans. Tout cela ne devrait pas fonctionner, et pourtant. Entre drones, explosions sonores, une batterie qui sonne comme des mitraillettes ou rend nauséeux et la voix étrange et inquiétante de Michael Gira, Swans a réussi un des meilleurs albums de l’année, et peut-être le plus intrigant. Quelques accalmies (le chant clair de Karen O sur Song for a Warrior) éclaircissent un ciel sombre et orageux, qui caractérisent un album qui pourrait être la bande originale d’un film d’horreur particulièrement malsain.


16 Sharon Van Etten - Tramp. En plus d’avoir une voix fantastique, Sharon Van Etten est aussi un auteur-compositeur fantastique, excellant de la même manière dans les morceaux acoustiques (Give Out) que dans ceux joués par un groupe entier (des National, Walkmen notamment). Très personnel tout en restant accessible, élégant et émouvant, parfois très intense (All I Can), Tramp hantera les moments sombres de personnes déprimées aux goûts musicaux avérés. Who the fuck is Lana Del Rey?


15 First Aid Kit - The Lion’s Roar. Deux jeunes soeurs suédoises, qui écrivent et chantent comme si elles avaient vécu plusieurs vies. Les chansons sont belles sans tirer sur la corde pathétique, et semblent ne pas avoir d’âge. Emmylou est une des plus belles chansons d’amour jamais écrites, point final. Espérons que leur songwriting continuera à évoluer.


14 Ceremony - Zoo. Après des débuts full hardcore, Ceremony soigne l’emballage, dépasse les deux voire trois minutes mais reste très intense, en clignant vers Mudhoney et Pixies.


13 Bad Books - II. Kevin Devine et Manchester Orchestra. 50% folk, 50% rock, 100% indie. Qui a besoin des reformations de Grandaddy ou Pavement quand on a de telles compositions et un flair mélodique rare.


12 Screaming Females - Ugly. Screaming Females, c’est surtout Marissa Paternoster, étrange hybride entre J Mascis et Carrie Brownstein, une guitariste très inventive à la voix particulièrement expressive. Mais elle sait aussi écrire de bonnes chansons, et s’entourer d’une section rythmique solide (d’autant plus que Steve Albini est derrière la console). La voix tourne autour de la guitare et inversement, en suivant des méandres et détours souvent étranges et inattendus, qu’on pourrait même parfois rapprocher de System of a Down en moins bourrin (Tell Me No). On regrettera peut-être la relative longueur de l’ensemble (53 minutes) mais l’inventivité compense amplement.


11 The Men - Open Your Heart. Second album en deux ans chez Sacred Bones Records, Open Your Heart élargit énormément la palette des Hommes. Toujours intense mais moins agressive, incoporant des éléments de krautrock, surfrock, psyché, post-punk et j’en passe (country?), leur musique passe la vitesse supérieure. La voix n’est pas toujours mise en avant, et quelques morceaux sont majoritairement voire totalement instrumentaux. De plus, The Men montre qu’ils sont encore capable de progresser, pour potentiellement atteindre des sommets. En attendant, Open Your Heart est déjà fantastique en soi.


10 Ty Segall - Twins. C’est peut-être seul qu’il est le meilleur. Comme si McCartney écrivait pour Mudhoney. Aucune idée de ce qu’il va faire en 2013 (se calmer? espérons que non), mais Ty Segall n’a aucune limite.


9 Melody’s Echo Chamber. Second des trois albums de ce top produits par Kevin Parker (Tame Impala), MEC est le projet de la chanteuse française Melody Prochet. La production de Parker est assez proche de ce qu’il fait pour son propre projet et pour Pond, mais les chansons de Prochet ont des influences plutôt dream pop. L’union des deux créent un son intéressant, plus dynamique de la dream pop “classique” mais moins psyché/out there que Tame Impala. L’album est très joli, très réussi et assez marrant quand Prochet chante en français. Une réussite de plus pour Kevin Parker, mais il n’est pas le seul à en être responsable.


8 Dinosaur Jr. - I Bet On Sky. De toutes les reformations qu’on a connu ces dernières années, celle de Dinosaur Jr est certainement la plus réussie, d’autant plus qu’elle était fort improbable. I Bet On Sky est leur album le plus tranquille, préférant les mélodies et rythmes mid-tempo aux brûlots punkoïdes joués à très haut volume. Ils se permettent même d’expérimenter (légèrement) avec des claviers. Mais quelle que soit la forme qu’elles prennent, les chansons de J Mascis restent inoubliables, grâce à sa voix et à son jeu de guitare inégalables. Stick a Toe In est bourrée d’émotion, Watch the Corners un chef d’oeuvre de maîtrise. On notera encoren la seule grosse accélération, Pierce the Morning Rain mais aussi les deux morceaux de Lou Barlow, surtout Recognition, probablement sa meilleure pour Dinosaur Jr. depuis leur retour. Vivement le nouvel album de Sebadoh en 2013. Encore un excellent album pour le trio, dont la seconde carrière est sans problème aussi réussie que la première, bien qu’assez différente.


7 Goat - World Music. La légende entourant ce groupe est assez barrée, ils sont censés venir d’un bled suédois perdu où se passent plein de choses bizarres comprenant des rituels vaudous et de la musique traditionnelle en perpétuelle évolution. Quoiqu’il en soit, World Music est bien cinglé en tant que tel, à la croisée de chemins entre rock, metal et afrobeat, le tout dans une esthétique punkoïde. Unique.


 6 Chromatics - Kill For Love. Qui a dit que l’album était mort? Chromatics prouve exactement le contraire, avec un opus de 77 minutes à la séquence absolument parfaite, qui le rapproche plus du déroulement d’un film que d’un album court comme on en a vu pas mal cette année. Il commence avec la meilleure reprise de Neil Young que je connaisse : Hey Hey My My, ici simplement renommée Into The Black, sans percussion mais avec une guitare répétitive sous delay ainsi que la voix de Ruth Radelet qui fait penser à celle de Nico. Ensuite, on retrouve quelques morceaux plutôt postpunk/synthpop qui précède un milieu d’album assez instrumental, tout en ambiances feutrées. Birds of Paradise est magnifique, avec ses craquements de vinyl intemporels, tout comme le lancinant Dust To Dust. Il se termine avec The River, pendant qu’on imagine les crédits défiler. En accordant une telle importance à la construction de l’album, mais aussi en soignant le fond, Chromatics réalise un des plus beaux albums de l’année.


5 Tame Impala - Lonerism. Second album pour Tame Impala, projet solo de Kevin Parker aussi impliqué cette année dans les albums de Pond et Melody’s Echo Chamber. Mais Lonerism est un niveau au-dessus de tout cela. Génie moderne, Parker s’inspire des meilleures heures du rock psychédélique des années 60 à nous jours pour sortir un album phénoménal, inventif et brillant. Même si Lonerism sonne souvent comme la suite de Tomorrow Never Knows chanté par le Lennon de A Day in the Life, il n’est pas dérivatif pour autant, et comprend son lot de mélodies et de rythmes qui claquent. Les mélodies laissent parfois la place aux textures, ambiances et bruits ambiants, et comprend aussi quelques longueurs, mais l’essence même de l’objectif parfaitement atteint de Parker, passe par une certaine répétition et abstraction. Il est difficile de penser qu’il pourra un jour surpasser cet album, mais s’il y arrive...


4 Japandroids - Celebration Rock. Rarement un album aura aussi bien porté son titre. Commençant et se clôturant sur des feux d’artifice, Celebration Rock l’est exactement, une fête célébrant la vie et le rock ‘n roll, tout au long de huit morceaux. Peut-être que rien n’est inventé, mais qu’importe : le duo Japandroids a capturé l’essence du rock comme peu d’artistes avant eux, et ils ont eu l’extrême intelligence de faire un album court, histoire de ne pas se répéter où de baisser d’intensité. Parfait de bout en bout, il contrebalance le mal être exprimé dans d’autres albums au sommet de ce top 100. Et c’est ça aussi, le rock, une somme de contradictions irrésolvables, mais cohabitantes.


3 Deftones - Koi No Yokan Meilleur album des Deftones? Nouveau White Pony? Ou juste un groupe dans sa zone de confort, une fois de plus? Probablement tout et rien à la fois. Après plus de vingt ans de carrière, sept albums et plus ou moins tous leurs contemporains oubliés, Deftones occupe une place à part dans le paysage musical actuel. Après avoir rénové le metal aux côtés de Korn et de Ross Robinson, ils l’ont plus ou moins quitté, ou en tout cas l’ont truffé d’influences 80s et d’une intensité romantique qui font généralement défaut dans le genre. Cependant, même si c’est sans doute l’album le moins metal du groupe, il n’est pas sans moments furieux, comme l’intro nu-metallesque de Gauze (intro suivie d’une voix mielleuse à souhait et d’un refrain Cure meets Smiths) ou d’entrée de jeu le riff bulldozer de Swerve City. Mais une fois de plus, tout est une question d’atmosphère, d’ambiance et de finesse, notamment dans l’habillage sonore précieux de Frank Delgado ou dans la basse de Sergio Vega, qui occupe maintenant sa vraie place au sein du groupe. Les morceaux montent en puissance, descendent, explosent et se calment, souvent en quelques minutes. Tout cela est lié par la voix de Chino Moreno qui, aussi cliché que cela puisse paraître, chante de mieux en mieux. Personne ne pourrait élever Entombed ou Tempest à ce niveau, entre murmures et hurlements. Rosemary représente peut-être la quintessence d’un album dont le seul reproche que je peux lui faire est son dernier morceau, un poil en deçà de ce qui précède. Mais ce n’est qu’un détail, lorsqu’on arrive à un tel niveau. Poignant, puissant, beau et intense, Koi No Yokan n’est pas mon album de l’année tout simplement parce que je savais qu’il serait mon préféré.


2 Cloud Nothings - Attack On Memory. En échangeant une pop-rock indé très lofi pour une production Albini et une ambiance, disons-le, grunge, Dylan Baldi a montré sans aucun effort qu’il n’avait pas à rougir de la comparaison avec Kurt Cobain. Comme lui, il sait écrire une pop song parfaite sans en avoir peur, comme lui il peut devenir enragé quasi sur commande. L’album déjà annoncé pour 2013 pourrait être celui de l’explosion d’un des plus grands talents contemporains.


1 Metz - Metz Je me suis parfois demandé ce qu’aurait été In Utero enregistré avant Nevermind, à savoir l’intensité violente et sans compromis de Cobain sans les sensibilités pop ni l’arrière-goût du succès. Et j’aime penser que cet album aurait pu vaguement ressembler à Metz. Sans aucune concession, parfois proche du noise rock, le premier album du trio (ben oui) claque fort, très fort, autant que les meilleures heures de Shellac (ben tiens) ou de Drive Like Jehu. Chaque morceau, chaque seconde ne tient que sur un fil, comme si la vie du groupe en dépendait (ce qui est apparemment le cas lors de leurs concerts). Si Dylan Baldi en est le pendant pop, alors Metz représente la partie disto/overdrive/big muff de Cobain (et de tous ceux qui venaient avant lui, devinez chez qui Metz est signé?). J’aurais même pu encore sortir le mot qui commence par G.